MONDRIAN / DE STIJL (expositions)
La dernière exposition monographique et rétrospective consacrée en France à l'œuvre de Piet Mondrian (1872-1944) datait de 1969 ; présentée à l'Orangerie des Tuileries, elle avait également été la première dans ce pays où l'artiste, Hollandais d'origine, avait pourtant passé près de trente années de sa vie. Depuis, et malgré le succès rencontré alors, l'expérience n'avait pas été reconduite : ainsi la dernière rétrospective en date, co-organisée par les Pays-Bas et les États-Unis en 1994-1996, n'avait pas fait étape en France. Il était donc plus que temps que le public français puisse se confronter directement à ces œuvres radicales et prendre la mesure de l'exigence de la quête picturale et spirituelle qui animait leur auteur. On ne manquera pas d'insister sur la gageure que représente une telle exposition, quand les collections nationales conservent moins de dix œuvres de cette figure majeure de l'art du xxe siècle et quand certaines, celles produites à New York à la fin de sa vie, ne quittent plus depuis fort longtemps le sol américain.
Aussi l'exposition conçue par Brigitte Leal au Centre Georges-Pompidou (1er décembre 2010-21 mars 2011), qui s'achève avec New York City I (1942) et l'évocation du dernier atelier de l'artiste, n'est-elle pas à proprement parler une rétrospective de l'œuvre de Mondrian. Ses débuts en peinture, placés sous le signe du réalisme hollandais, étaient absents, non seulement parce qu'ils avaient été montrés en 2002 au musée d'Orsay, mais aussi pour servir un propos, double, comme l'était du reste cette exposition bipartite. D'une part, le volet « Mondrian » se concentre sur la période parisienne et plus spécifiquement sur le dialogue avec le cubisme ; d'autre part, la partie « De Stijl 1917-1931 », sous le commissariat de Frédéric Migayrou, montre le peintre dans un milieu artistique et intellectuel, celui des Pays-Bas au tournant du siècle, pétri d'ésotérisme et aspirant à de profondes réformes sociales.
Au début de l'exposition et à la charnière entre les deux parties, une salle retraçait le séjour forcé de Mondrian dans son pays natal pendant la Première Guerre mondiale. Là, après avoir découvert le cubisme et séjourné une première fois à Paris, il fit la rencontre, décisive pour son évolution future et pour le mouvement De Stijl, de Theo van Doesburg et de Bart van der Leck.
Ensuite, l'exposition était visiblement scindée en deux : d'un côté, elle déployait chronologiquement le parcours du peintre à partir de 1911, dans toute sa logique et tout son isolement aussi, tandis que de l'autre, elle accumulait les types de production et les projets diversement documentés, qui n'étaient certes pas sans parenté avec le néoplasticisme, mais sans que le lien soit véritablement explicité. Initialement conçus séparément, les deux volets étaient donc plus juxtaposés que liés par de véritables circulations. Ils pouvaient en outre parfois susciter la confusion, par exemple quant à la délicate question de l'extension souhaitée des principes élaborés dans la peinture, celui d'équivalence en particulier, au-delà des limites du tableau. La juxtaposition des œuvres présentées pouvait ainsi laisser croire que les rares projets d'environnements conçus par Mondrian avaient trouvé à se réaliser effectivement.
La partie « Mondrian » de l'exposition montrait de façon fort convaincante l'évolution de l'artiste : l'élimination progressive du sujet, les recherches sur la ligne et la couleur, la définition des composantes élémentaires du néoplasticisme – lignes noires, angles droits, plans de couleurs primaires et de non-couleurs – et l'exploration de leurs possibilités picturales. Concluant la phase d'expérimentation, les compositions produites en 1920[...]
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Écrit par
- Guitemie MALDONADO : professeur à l'Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris
Classification
Média