MONGOLIE, histoire
La Mongolie-Intérieure
Dans les derniers jours de 1911, la République est proclamée en Chine. Les princes khalkha, qui ne s'étaient jamais sentis liés qu'à leur suzerain Qing, se déclarent aussitôt indépendants de la Chine. De ce jour, le destin des trois unités nées des conquêtes mandchoues en Asie centrale va se séparer. La Mongolie-Intérieure, formée des tribus méridionales ralliées dès les premières décennies du xviie siècle, restera définitivement engluée dans le monde chinois, quels que soient ses efforts pour s'en dégager. Il en sera de même pour le Xinjiang (ou Turkestan chinois), créé en 1884 dans les territoires des anciennes Djoungarie et Kashgarie, régions en majorité musulmanes depuis que les massacres de 1756-1757 y ont décimé l'élément mongol. Au contraire, la Mongolie-Extérieure, composée en majorité des Khalkha soumis aux Qing en 1691, va évoluer vers une indépendance, que garantira la Russie puis l'Union soviétique, et elle deviendra la République populaire de Mongolie (R.P.M.), puis République mongole.
Les autres peuples de souche mongole – si l'on excepte la poignée des Moghōl d'Afghanistan – vivent dans les frontières de la fédération de Russie : les Kalmouks de la Volga, issus des Oirat, au nombre de 174 000 (vers 1990), et les Bouriates de Sibérie.
La diaspora, commencée dès l'époque de Gengis-khan, a donc entraîné les Mongols dans des mondes culturels variés. Pourtant, du xiiie siècle à nos jours, une civilisation homogène les unit dans le temps et dans l'espace. Et ce trait rend attachante une étude des coutumes et de la culture des Mongols à l'ère contemporaine.
Sous le régime républicain
En Mongolie-Intérieure, le problème de la sauvegarde des traditions face à la modernisation s'est posé en des termes tout particuliers. La suzeraineté, déjà lourde, des Qing s'était transformée, dès les débuts de la République chinoise, en une emprise tyrannique et destructrice de l'ordre ancien. Les six confédérations, dans lesquelles étaient groupées depuis plus de deux siècles les quarante-six bannières de Mongolie-Intérieure, ainsi que les ethnies tümet et čakhar rattachées antérieurement au gouvernement central, furent transformées en provinces chinoises, où les « seigneurs de guerre » chinois firent la loi : la Mongolie-Intérieure était alors rayée de la carte politique. Et elle était menacée de disparition physique par suite des empiétements des agriculteurs chinois qui envahissaient, plus nombreux chaque année, les terres quelque peu fertiles et rejetaient les nomades dans les zones arides.
Les Japonais, qui en 1931 s'emparaient de la Mandchourie et visaient à l'hégémonie en Asie orientale, virent tout le parti à tirer de la situation. Leur intense propagande sur les thèmes du panmongolisme (ils prônaient la création d'une « Grande Mongolie » qui aurait englobé tous les Mongols de Chine, de R.P.M., d'U.R.S.S.), d'un lamaïsme militant contre le communisme, de la suspension de la colonisation chinoise, porta bientôt ses fruits. Le principal leader nationaliste conservateur, le prince De [Tö], originaire d'une des dernières régions de Mongolie-Intérieure non sinisée, le nord du Čakhar, se rallia en 1935 ; et peu après les Japonais purent étendre leur conquête plus à l'ouest. Mais les Mongols ne furent pas réunis en un seul État autonome, comme ils l'espéraient. Et les brutalités des militaires, l'incompréhension des dirigeants japonais devant le problème du nomadisme aliénèrent vite à l'occupant les sympathies qu'il avait d'abord gagnées.
Sous le régime populaire
À la défaite des puissances de l'Axe, ce fut le communisme qui l'emporta assez rapidement, sous l'action d'Ulanfu (ou plutôt Ulanhu selon la latinisation maintenant officielle en R.P.C.,[...]
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Écrit par
- Françoise AUBIN : directeur de recherche au C.N.R.S. et à la Fondation nationale des sciences politiques (C.E.R.I)
- Vadime ELISSEEFF : conservateur en chef du musée Guimet, directeur d'études à l'École pratique des hautes études en sciences sociales
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Médias
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