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CABALLÉ MONTSERRAT (1933-2018)

Curiosité et éclectisme

Si elle ne délaisse jamais les grands rôles – Norma, Tosca, Amelia du Bal masqué de Verdi, Leonora du Trouvère –, la soprano se tourne régulièrement vers les ouvrages belcantistes de Bellini (Imogene d'Il Pirata), Rossini (rôle-titre d'Elisabetta, regina d'Inghilterra), Donizetti (rôles-titres de Parisina et de Caterina Cornaro), et contribue à la redécouverte d'œuvres oubliées ou négligées : Les Danaïdes d'Antonio Salieri (rôle d'Hypermnestra), Saffo de Giovanni Pacini (rôle-titre), Agnesvon Hohenstaufen de Gaspare Spontini (rôle-titre), La Fiamma d'Ottorino Respighi (Silvana)... Maria Callas n'est plus (elle est morte en 1977) ; deux cantatrices prestigieuses, Leyla Gencer et Joan Sutherland, ont repris le flambeau du bel canto. Elles sont bientôt rejointes par Montserrat Caballé, qui dispose d'atouts exceptionnels : une technique solide, une longueur de souffle étonnante, une voix ample qu'elle peut nuancer à volonté – jusqu'à ces impalpables pianissimos qui ont fait sa réputation –, un timbre dont la richesse n'a d'égale que la pureté. Certains lui ont souvent reproché sa placidité scénique ; il est vrai que ses talents d'actrice sont limités et ne dépassent guère un registre des plus conventionnels (son embonpoint, dont elle sait se moquer avec humour, ne lui permet pas d'être une bête de scène). Mais, chez cette merveilleuse musicienne, l'art vocal crée son propre théâtre ; la justesse de l'expression vient du phrasé, intense ou largement déployé, de la dynamique, du forte le plus insolent au piano le plus ténu, de ce legato qui frise la perfection (alors que la vocalisation n'est pas toujours irréprochable). La beauté de ce chant à l'état pur est telle qu'on ne peut y rester insensible.

Vers la fin des années 1980, Montserrat Caballé commence à réduire ses apparitions – il est vrai qu'elle a toujours été de santé fragile. Ce qui ne l'empêche pas, en 1989, d'aborder un rôle périlleux, l'Isolde de Wagner, au Liceu de Barcelone, et, en 1992, de chanter Madama Cortese d'Il viaggioa Reims de Rossini au Covent Garden de Londres. Au printemps de 2007, pour fêter ses soixante-quatorze ans, elle incarne la Duchesse de Crackentorp à la Staatsoper de Vienne, dans une production de La Fille du régiment de Donizetti, aux côtés de Natalie Dessay et de Juan Diego Flórez. En 2012, elle célèbre ses cinquante ans de scène au Liceu lors d’un récital qui retrace sa collaboration avec le théâtre catalan. Rien ne peut étonner de la part de celle qui, en 1987, gravait le célèbre Barcelona en duo avec Freddie Mercury, leader du groupe Queen, et « bad boy » de la pop music.

Elle meurt à Barcelone le 6 octobre 2018.

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Montserrat Caballé dans <em>Norma</em> - crédits : Jack Mitchell/ Getty Images

Montserrat Caballé dans Norma