Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

DESAI MORARJI (1896-1995)

Dirigeant éminent du Parti du Congrès, Premier ministre de l'Inde de 1977 à 1979, Morarji Desai reste une figure controversée de la vie politique indienne. Sa personnalité dérange et rebute. Ses idées politiques, mélange de libéralisme et d'idéaux gandhiens, suscitent l'opposition au sein même de son propre parti, au point de l'écarter par deux fois de la succession à la tête du gouvernement indien.

Cet homme austère et hautain, voire entêté, a la réputation de ne condescendre à aucun compromis. Il adhère, selon ses propres termes, à la plus “rigide des disciplines”, ce qui se traduit par un mode de vie spartiate, le puritanisme des mœurs, le respect des traditions familiales et religieuses. Il prêche la vie simple, porte le vêtement en textile naturel qu'il tisse lui-même à la main (le khadi), suit un régime strictement végétarien...

Les traits gandhiens de son caractère doivent beaucoup à ses origines sociales. Morarji Desai naît le 29 février 1896 dans une famille brahmane nombreuse et pauvre, d'un petit village du Gujarat, base du traditionalisme gandhien. La pauvreté du milieu familial, le décès précoce de son père l'amènent très jeune à assumer la charge des responsabilités familiales.

C'est sans doute une des raisons pour lesquelles Morarji Desai entre tardivement en politique, à l'âge de trente-quatre ans. En 1930, il devient membre du Gujarat Pradesh Congress Committee et, l'année suivante, participe activement au mouvement de désobéissance civile lancé par le Mahatma Gandhi. Son engagement dans le mouvement d'indépendance sera dorénavant total, et son ascension politique fulgurante. En 1937, il est élu à l'Assemblée législative de Bombay et nommé ministre au sein du premier gouvernement congressiste de cette province. De 1946 à 1952, il est ministre de l'Intérieur dans le gouvernement congressiste de Bombay avant d'en être le chief minister, de 1952 à 1956.

En 1956, il est appelé à New Delhi pour participer au gouvernement central de l'Union indienne et devient une figure incontournable de la politique nationale. Ministre du Commerce et de l'Industrie jusqu'en 1958, il est promu au rang de ministre des Finances, poste qu'il occupera jusqu'en 1963, l'année de son “limogeage” par le biais du Kamaraj Plan. Ce plan, du nom du chief minister de l'État de Madras (K. Kamaraj), conçu par le Premier ministre Jawaharlal Nehru pour préparer sa succession, vise en réalité à en écarter certaines personnalités congressistes. Officiellement, il consiste à demander à plusieurs ministres de démissionner pour se consacrer entièrement à la “revitalisation” de l'organisation du Congrès. Morarji Desai est particulièrement visé en raison de son opposition aux grandes orientations socialisantes de Nehru en matière économique. Il est de fait beaucoup plus proche des idées libérales de l'ancien grand rival de ce dernier au sein du Parti du Congrès, Vallabbhai Patel, dont il se considère comme le “fils spirituel”. Morarji Desai tente en vain, en 1964 et 1965, de s'assurer le contrôle de la présidence du parti. Plus grave, il échoue à se faire élire leader du groupe parlementaire du Congrès, et par conséquent il ne sera pas Premier ministre à la mort de Nehru, en 1964. Il subit un deuxième échec au lendemain du décès inattendu du successeur de Nehru, Lal Bahadur Shastri, en 1966. Par 355 voix contre 169, le groupe parlementaire du Congrès lui préfère Indira Gandhi. Celle-ci décide de le nommer ministre des Finances et vice-Premier ministre en 1967. Mais deux ans plus tard, elle lui retire son portefeuille en raison de son hostilité à la nationalisation des banques. Ulcéré, Morarji Desai démissionne avec fracas. Dénonçant les méthodes du Premier ministre, il contribue à la scission du Parti du Congrès et à la création[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : maître de conférences à l'Institut d'études politiques de Paris

Classification

Autres références

  • GANDHI INDIRA (1917-1984)

    • Écrit par
    • 1 831 mots
    • 2 médias
    ...période que date sa méfiance instinctive envers ceux qui l'entourent, hormis les plus proches membres de sa famille. Quoi qu'il en soit, d'emblée un homme, Morarji Desai, chef de file de l'une des tendances conservatrices du parti, s'oppose à elle. La majorité du parti ne le suit pas, mais pour des raisons...
  • INDE (Le territoire et les hommes) - Histoire

    • Écrit par , et
    • 22 936 mots
    • 25 médias
    Les revers du Congrès lors des élections de 1967 suscitent bien entendu des critiques dans les rangs du parti, y compris de la part deMorarji Desai – l'opposant malheureux d'Indira Gandhi lors de la succession de Shastri –, qui est devenu ministre des Finances et vice-Premier ministre. Desai représentant...