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MOTET

Le motet classique

Sous l'influence du stile rappresentativo, né à Florence à la fin du xvie siècle, la musique religieuse change totalement de caractère. C'est le début de l'époque baroque. Claudio Monteverdi est l'un des premiers à appliquer à la musique d'église les principes de la monodie accompagnée et de la basse continue. Les motets de Monteverdi sont à une ou à deux voix avec accompagnement instrumental plus ou moins concertant. Carissimi, puis Legrenzi développent le procédé au point d'organiser le motet en une suite de récits, d'airs, de duos, de trios et de chœurs avec basse continue ou symphonie.

C'est aussi en Italie que naquit l' oratorio, ou drame sacré, dont le premier exemple est la Rappresentazione di anima e di corpo d'Emilio de' Cavalieri, datant de 1600. Ces vastes fresques ne manquèrent point d'avoir une influence sur l'évolution du motet, si bien qu'il est difficile de distinguer du point de vue du style, sinon du point de vue des dimensions, les grands motets de l'époque baroque des cantates et des oratorios. Les mêmes principes y sont appliqués.

En France, la Chapelle royale devient le creuset d'où sortira le grand motet de style versaillais, qui reste au xviiie siècle la forme presque unique de la musique religieuse.

Les précurseurs sont Nicolas Formé, Jean Veillot et Thomas Gobert. L'écriture harmonique remplace progressivement l'écriture contrapuntique ; les modes majeur et mineur modernes prennent le pas sur les vieux modes ecclésiastiques ; l'accompagnement instrumental se développe ; l'orchestre pénètre au sanctuaire. Lorsque Henry Du Mont et Pierre Robert accèdent ensemble à la direction de la Chapelle du roi, en 1663, la voie est ouverte pour l'éclosion des chefs-d'œuvre de l'école française. Pendant le règne de Louis XIV, on chante pour le roi trois motets aux offices quotidiens, et pour les offices solennels ces motets se doivent d'avoir plus d'éclat et d'ampleur. Il s'agit pour les musiciens de satisfaire leur souverain. Ils s'y emploient tant et si bien que les offices de la Chapelle royale deviennent une des manifestations les plus prestigieuses de la cour de Versailles.

De 1670 à 1683, Du Mont et Robert fournissent la majeure partie des motets chantés à la chapelle de Versailles : ce sont, pour la plupart, des motets à double chœur (petit chœur de solistes alternant avec le grand chœur) avec orchestre à cordes et basse continue (orgue).

Si Lully donne au théâtre le meilleur de lui-même, il écrit aussi des motets pour la Chapelle de Sa Majesté, dont certains tels le Miserere, le Quare fremuerunt gentes ou le Te Deum, sont des chefs-d'œuvre. Outre les cordes, les instruments à vent, et notamment les trompettes, renforcent l'éclat de ces grands motets de circonstance.

Parallèlement à la Chapelle royale, des églises, des cathédrales ou des couvents donnent à d'autres musiciens l'occasion d'enrichir le répertoire. Au couvent des Théatins, à Paris, l'Italien Paolo Lorenzani, protégé de Mme de Montespan, avant de devenir maître de chapelle au Vatican, fait connaître ses motets à une, deux, trois, quatre ou cinq parties avec symphonie et basse continue, qui, imprimés en 1693 et dédiés au roi, contribuent à accentuer l'influence italienne sur la musique française. Marc Antoine Charpentier, maître de musique des Jésuites, qui avait été l'élève à Rome de Carissimi, compose plus de cent motets, dont l'écriture dense, rehaussée des combinaisons instrumentales les plus variées, ne laisse pas de séduire un auditoire avide de retrouver à l'église tout le faste du théâtre lyrique. « Ainsi, remarque Claude Crussard, l'opéra, avec son style, sa pompe, ses interprètes, pénètre la musique religieuse et confère aux grandes fresques sonores d'un Lully, d'un Bernier,[...]

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