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MOU'ĪN AL-DIN SULAYMĀN PERVĀNÈ (mort en 1277)

Fils d'un vizir du sultan seldjoukide Kaykhosraw II (1237-1246), Mou'īn al-din Sulaymān occupe très tôt des postes importants et est gouverneur de la province de Tokat, puis de celle d'Erzindjan ; il reçoit en 1256 le titre de Pervānè, correspondant à peu près à celui de grand vizir : de fait, durant cette période où les trois fils de Kaykhosraw se disputent sa succession, Mou'īn al-din assure la direction des affaires du sultanat.

Lorsqu'en 1260 le khan mongol divise l'État seldjoukide en deux parties, celle de l'est revient à Roukn al-din Kilidj-Arslan IV qui a pour vizir Mou'īn al-din Pervānè, et celle de l'ouest à Kaykā'ous II. Celui-ci, à la suite d'intrigues du Pervānè, doit s'enfuir à Antalya, puis à Constantinople, enfin en Crimée auprès du khan du Kiptchak, où il mourra en 1276. Sa fuite permet à Kilidj-Arslan IV de réunifier le sultanat à son profit. En 1265, Mou'īn al-din enlève aux empereurs grecs de Trébizonde la ville de Sinope qui sera par la suite gouvernée par ses descendants. La même année, il fait assassiner Kilidj-Arslan IV, qui projetait de l'éliminer, et fait proclamer sultan le fils de celui-ci, Kaykhosraw III, un tout jeune enfant. Mou'īn al-din Sulaymān Pervānè, vizir, est alors le véritable détenteur du pouvoir en Asie Mineure seldjoukide et gouverne sagement pendant une dizaine d'années, s'efforçant de maintenir un équilibre entre l'autorité mongole et la pression mamelouke. Lorsqu'en 1276 le sultan mamelouk Baybars prépare une intervention en Asie Mineure — peut-être avec la secrète approbation de Mou'īn al-din —, des incidents éclatent (le sultan est même enlevé par des rebelles) et Mou'īn al-din est dans une situation difficile, entre les Mongols qui le poussent à agir contre Baybars, et les émirs turcomans d'Asie Mineure, favorables à celui-ci. Le 16 avril 1277, Baybars, entré en Anatolie, triomphe des Mongols et du Pervānè à Kayseri, occupe cette ville, tandis que le sultan et le Pervānè trouvent refuge à Tokat. Au départ de Baybars, le khan mongol Abaqa, soupçonnant le Pervānè d'être responsable de la défaite de ses troupes, le fait arrêter et exécuter le 2 août 1277.

La mort de Mou'īn al-din Sulaymān Pervānè, personnalité remarquable, sonne la fin de l'État seldjoukide unifié et indépendant. Le vizir entretenait des rapports amicaux avec les grands mystiques Mevlānā Djelāl al-din Roumī et Sadr al-din Qonevī qui moururent à peu près en même temps que lui. Ainsi disparut une génération d'hommes d'État et de religion qui avaient contribué à la grandeur du sultanat seldjoukide d'Asie Mineure.

— Robert MANTRAN

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Provence-Aix-Marseille-I

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