MOUILLAGE
Mouillage réactif, propulsion et contrôle
Une goutte sur son support n'est pas toujours à l'équilibre. Si elle chevauche une discontinuité chimique, entre une zone hydrophobe et une zone hydrophile, elle se déplace jusqu'à être du côté hydrophile, ce qui minimise son énergie de surface (comme si elle descendait une pente, la pente naturelle qui consiste à aller du côté qu'elle « aime »). C'est ce déplacement qui permet les reconfigurations à petite échelle que nous évoquions plus haut. Il y a bien des situations pratiques où il peut être intéressant que des gouttes se déplacent d'elles-mêmes : un condenseur de vapeur, par exemple, risque de voir son efficacité contrariée par la multiplicité des gouttes qu'il recueille (qui s'y collent puis s'y évaporent), alors que les gouttelettes d'une buée se dirigeant d'elles-mêmes dans une direction pré-établie vont fusionner et pouvoir être aisément récupérées.
Plusieurs astuces remarquables ont été développées depuis le milieu des années 1990 pour amplifier le mouvement spontané des liquides. Ces systèmes utilisent le mouillage réactif : si une forme de réaction chimique se produit, les deux côtés d'une goutte (celui où la réaction se fait et celui où elle n'a pas encore eu lieu) se trouvent dans des environnements différents, et de cette asymétrie peut naître un mouvement. Les gouttes filantes décrites par Colin Bain et Thierry Ondarçuhu appartiennent à cette catégorie : une molécule hydrophobe (et oléophobe) réagit avec la surface du support et le rend localement non mouillant, à la suite de quoi la goutte ne cessera de fuir la trace hydrophobe qu'elle installe.
Un champ extérieur permet également de manipuler une goutte, et l'exemple le plus frappant est sans doute celui des champs électriques. L'électromouillage décrit comment une goutte s'étale sous l'effet d'un tel champ et plusieurs applications découlent de cet effet. Bruno Berge a ainsi proposé à la fin des années 1990 de moduler la courbure des gouttes et d'en faire des lentilles à focale variable qui équipent aujourd'hui certaines caméras de nos téléphones mobiles. Frieder Mugele, à Twente, fait subir des cycles d'étalement-rétraction à des gouttes sous champ alternatif, et réalise ainsi des mélanges rapides à petite échelle, grâce aux écoulements internes qui résultent de ces mouvements.
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Écrit par
- David QUÉRÉ : directeur de recherche à l'École supérieure de physique et de chimie industrielles ParisTech et au laboratoire d'hydrodynamique de l'École polytechnique
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