ÉCOLOGISTE MOUVEMENT
L'écologie politique en France
Naissance du mouvement écologiste en France (1968-1974)
Les écologistes héritent de la conception des rapports politiques de l’après-Mai-68. La période a été à la fois marquée par un sursaut du mouvement ouvrier (avec l'extrême gauche, trotskiste ou maoïste, imprégnée de léninisme) et par un mouvement contestataire « postmoderne » : un gauchisme d'inspiration nettement plus anarchiste avec, à ses extrêmes, les provos et les situationnistes. La contestation soixante-huitarde a touché le monde entier, des pays de l'Est à l'Amérique latine, du Japon à l'Afrique. Son échec global en tant que projet révolutionnaire entraîna, à côté d'infinies et subtiles divisions de la mouvance gauchiste, un morcellement, voire un repli, en une kyrielle de luttes particulières. Chaque cause eut son propre combat : féminisme, homosexualité, immigration, environnementalisme, antimilitarisme, communautarisme, économie distributive, régionalisme, tiers-mondisme, lutte contre le nucléaire... En France, la plupart des fondateurs de l'écologie politique ont baigné dans ces combats, ou se sont côtoyés au sein du Parti socialiste unifié (PSU), qui réunissait alors les déçus de la gauche socialiste et communiste. Ils ont également dû composer avec d’autres militants, issus des milieux environnementalistes, plus préoccupés par les enjeux du quotidien.
La période est en outre marquée par la médiatisation des premières grandes catastrophes écologiques : la marée noire provoquée par le naufrage du Torrey Canyon en Bretagne (1967), ou la pollution du Rhin par rejet d'endosulfan (1969). En 1969, un journaliste de RTL, Jean Carlier, mobilise des naturalistes puis l’opinion publique pour empêcher la réalisation d’un vaste projet touristique dans le parc national de la Vanoise. Avec la toute jeune Fédération française des sociétés de protection de la nature, fusion des principales organisations de défense de la nature, menée par Jean-Pierre Raffin, cette première grande campagne écologiste sera gagnée.
Les premiers cercles militants écologistes se constituent alors. En 1970, Survivre et vivre se constitue autour des mathématiciens Alexander Grothendieck et Pierre Samuel (Pessis, 2014). Fondée en 1971 à l'initiative du journaliste Alain Hervé, la section française des Amis de la Terre (Friends of the Earth International, fédération qui a vu le jour la même année) crée la revue Le Sauvage (1973-1980), vite dominée par Brice Lalonde. En Alsace, la pacifiste féministe Solange Fernex et Antoine Waechter fondent Écologie et survie et seront à l’initiative de la première candidature des écologistes à des élections législatives en 1973 à Mulhouse (2,7 % des voix).
Ces années sont aussi celles des premières mobilisations nationales écologiques. En 1970, la contestation antinucléaire s'affirme – création du Comité contre la pollution à La Hague, et du Comité de sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin, qui aboutira à l'organisation de la première manifestation nationale antinucléaire. En 1971, le combat emblématique du Larzac commence : il durera dix ans et servira de catalyseur pour de nombreux militants. En octobre de la même année, Pierre Fournier organise, à Bugey-Cobayes, une manifestation qui rassemble 15 000 personnes (dont Théodore Monod, Jean Rostand et Paul-Émile Victor). En 1972, Brice Lalonde organise une manifestation de 10 000 cyclistes à Paris. En 1973, il jette un pont entre la défense de l’environnement et le pacifisme en participant à une expédition maritime de protestation contre les essais nucléaires français à Mururoa.
Dans les années 1970, les publications spécialisées dans la question écologique foisonnent. Jean-Luc Burgunder lance l'Agence de presse de réhabilitation écologique, bientôt remplacée en 1975 par une[...]
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Écrit par
- Bruno VILLALBA : professeur de science politique, AgroParis Tech, membre du laboratoire Printemps (professions, institutions, temporalités)
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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