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MOX (Mixed Oxide), industrie nucléaire

Risques associés à l'utilisation du MOX

Le transport du plutonium et la fabrication des combustibles MOX sont des opérations à haut risque. En effet, le plutonium est beaucoup plus radioactif et radiotoxique que l'uranium. En termes de radioprotection, la limite de dose annuelle, fixée par les autorités de radioprotection pour le public, se traduit pour un adulte à l'inhalation d'une quantité de 1 millième de microgramme de plutonium. Du fait de sa teneur en plutonium, un combustible neuf MOX est environ trois cent mille fois plus radioactif qu'un combustible neuf à uranium enrichi et il est beaucoup plus chaud. Des emballages spécifiques ont été développés pour le transport du plutonium et des combustibles MOX neufs et usés.

L'utilisation du MOX dans les réacteurs présente de nombreux inconvénients. Radioactivité et température rendent la manipulation des combustibles plus complexe et le contrôle du réacteur plus délicat. En cas d'accident, la présence de MOX dans le réacteur et les piscines de combustibles irradiés aggrave les conséquences possibles, y compris par le risque de criticité (emballement de la réaction en chaîne). Enfin, les combustibles MOX irradiés (c'est-à-dire sortis du réacteur après usage) sont beaucoup plus radioactifs que les combustibles irradiés classiques. Ils doivent être refroidis beaucoup plus longtemps en piscines près des réacteurs (au minimum deux ans et demi contre six mois à un an pour les combustibles à uranium) et le temps total de refroidissement est environ dix fois plus long : cinquante ans au lieu de cinq à dix ans. Ces combustibles irradiés ne sont pas retraités (des essais de retraitement ont toutefois été conduits à La Hague entre 1998 et 2008 pour un total de 68,5 tonnes) et sont stockés en l'état dans les piscines de La Hague après leur séjour dans celles des réacteurs. Au final, toute l'opération ne permet de réduire que de 15 à 20 p. 100 environ la quantité de plutonium produite initialement dans les réacteurs « non moxés ». Utiliser du MOX présente surtout des inconvénients pour E.D.F. car, outre les difficultés d'exploitation, faire retraiter les combustibles irradiés classiques lui coûte plus cher que de les stocker dans des piscines et la fabrication du combustible MOX est plus onéreuse que celle des combustibles à uranium.

On envisage également de fabriquer des combustibles MOX à partir des stocks de plutonium militaire, ce qui serait la seule façon de neutraliser ce plutonium. Mais, qu'il s'agisse de plutonium d'origine militaire ou des stocks de dizaines de tonnes de plutonium « civil » accumulées à La Hague ou à Sellafield, on peut préférer une voie innovante d'immobilisation du plutonium avec d'autres déchets radioactifs, par exemple dans une matrice de verre ou de céramique. Dans tous les cas, combustible irradié non retraité ou immobilisation, le plutonium ne disparaît pas mais il est neutralisé.

La poursuite de la production de plutonium par le retraitement est justifiée encore aujourd'hui, pour les promoteurs du nucléaire, par la relance des réacteurs R.N.R. qui utilisent le plutonium comme principal matériau fissile. Mais ces réacteurs (dits de « quatrième génération »), du fait de l'utilisation du plutonium comme combustible, de la technique des neutrons rapides et du sodium comme fluide caloporteur pour les projets les plus avancés, présentent des risques importants qui font fortement douter de la fiabilité de cette filière – son coût posant aussi problème.

— Bernard LAPONCHE

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  • : expert en politiques de l'énergie et de maîtrise de l'énergie

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