MULTIPLICATION VÉGÉTATIVE
Caractéristiques de la multiplication végétative
On peut, d'une façon générale, considérer la multiplication végétative comme fixatrice, pour les individus de la descendance, des caractéristiques acquises par un organisme au cours des vicissitudes de la reproduction sexuée. En effet, les processus mis en œuvre permettent, sauf cas exceptionnels, la permanence du stock génotypique dans une population issue d'un individu de patrimoine héréditaire donné.
Mais, si la multiplication végétative apparaît comme conservatrice de l'ensemble du génotype, il n'en est pas toujours de même en ce qui concerne son fonctionnement. En effet, on a mis en évidence la transmission dans la descendance de certains types de fonctionnement tant pour des Champignons que pour des Phanérogames. Les faits sont particulièrement nets chez les plantes possédant des rameaux dimorphes, les uns dressés, à symétrie radiale, dits orthotropes, les autres latéraux, horizontaux, souvent à symétrie bilatérale, dits plagiotropes ; les boutures de ces deux types d'axes donnent, en effet, naissance à des plantes morphologiquement très différentes. Par exemple chez Phyllanthus amarus, les rameaux plagiotropes se développent très peu ; bouturés, ils présentent une croissance indéfinie sur le mode « plagiotrope ». Chez certaines plantes d'intérêt économique comme le cacaoyer et l'hévéa, des propriétés de ce type ont été mises en évidence ; chez l'hévéa, elles sont actuellement en voie d'utilisation et permettent d'espérer une augmentation très sensible de la production de latex à l'hectare.
Les processus de sénescence, interprétés comme un mode particulier de fonctionnement du génotype, peuvent être transmis, lors du bouturage, comme cela a été démontré chez des Champignons. On a observé que certaines cultures présentent, de façon aléatoire, des zones morphologiquement différentes du thalle initial. Des repiquages successifs de fragments provenant de ces zones donnent naissance à un thalle de structure nouvelle ; on a pu montrer qu'il s'agissait de l'acquisition progressive par le mycélium en croissance de propriétés (ici la sénescence) susceptibles d'être transmises par les fragments repiqués.
La transmission d'un certain type de fonctionnement acquis par un individu peut même être le fait d'organes aussi spécialisés que des graines apomictiques (cf. infra).
L'étude de la morphogenèse a mis en valeur l'existence de fonctionnements différents du génome d'une même plante selon les niveaux considérés. Ainsi, les bourgeons peuvent manifester des potentialités différentes lorsqu'on les sépare de cet axe. La multiplication végétative permet, en quelque sorte, d'isoler et de maintenir ces différences de fonctionnement du génome.
Mais souvent le végétal, issu dans les conditions naturelles de bulbilles ou de tubercules, présente les mêmes étapes de développement qu'un individu issu d'une semence d'origine sexuée. Or, par rapport à l'organisme qui lui a donné naissance, la graine est physiologiquement marquée par des processus de « rajeunissement », c'est-à-dire par une modification dans le mode de fonctionnement de l'information génétique. La multiplication végétative naturelle peut donc, dans certains cas, aboutir à un résultat comparable.
Il faut aussi souligner que, parfois, la multiplication végétative est liée à la production d'organes ou groupes d'organes de résistance (tubercules, sclérotes, bulbes, bulbilles, etc.) jouant, sous le rapport de l'adaptation aux conditions extérieures, un rôle comparable aux graines.
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Écrit par
- René NOZERAN : professeur honoraire à la faculté des sciences d'Orsay.
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