MUNICH (ACCORDS DE)
Avec le rattachement au Reich des trois millions d'Allemands des Sudètes, les accords de Munich du 29 septembre 1938 marquent une étape décisive dans le programme d'expansion de l'Allemagne nazie. Avant l'Anschluss, les revendications de ces derniers ne portaient que sur un degré plus large d'autonomie. Mais, le 24 avril 1938, un congrès des Allemands des Sudètes présidé par Henlein réclame la création d'un État national sudète en accord avec Berlin, et la presse allemande déchaîne une violente campagne contre Prague. Le problème tchèque était posé. L'unité de la Tchécoslovaquie était garantie par deux traités avec la France, les traités de 1924 et de Locarno en 1925, prévoyant une aide immédiate en cas d'attaque allemande, et par un traité avec l'U.R.S.S. (1935), subordonné à l'exécution par la France de ses engagements. La Grande-Bretagne, qui n'était pas liée par un traité avec la Tchécoslovaquie, tenta par l'intermédiaire de Chamberlain une politique de conciliation, d'« apaisement », qui se traduisit par l'envoi de lord Runciman en août 1938 comme médiateur entre Henlein et Prague. Le 5 septembre, le gouvernement tchécoslovaque accepte la plupart des revendications sudètes. Néanmoins, de violents incidents éclatent, visiblement dirigés de Berlin. Le 12 septembre, à Nuremberg, Hitler prononce un discours très violent contre Prague.
En France, le gouvernement Daladier, qui a succédé au Front populaire, n'a pas de majorité assez cohérente pour imposer sa politique. Il avait proclamé qu'il tiendrait ses engagements, mais Georges Bonnet, le nouveau ministre des Affaires étrangères, était partisan d'une conciliation et soutenu en cela par une grande partie de l'opinion, travaillée par le pacifisme de gauche, horrifiée à la perspective d'une hécatombe semblable à celle de 1914-1918 et encouragée par l'attitude « prudente » de la Grande-Bretagne. L'U.R.S.S., sans frontière commune avec la Tchécoslovaquie, exigeait pour intervenir le libre passage de ses troupes par la Pologne ou, éventuellement, par la Roumanie, et ces deux pays opposaient un refus. D'ailleurs, on savait l'Armée rouge très affaiblie par les purges staliniennes et on disait même que l'U.R.S.S. verrait sans déplaisir une guerre entre l'Allemagne et les démocraties occidentales dont elle profiterait pour tirer les marrons du feu. Enfin, en France comme en Angleterre, on chuchotait que Hitler bluffait.
C'est dans une telle conjoncture que, le 15 septembre, Chamberlain rencontre Hitler à Berchtesgaden et, devant la mise en demeure de celui-ci, accepte le principe de l'annexion des Sudètes par l'Allemagne. Les Français sont plus hésitants ; mais, devant le pessimisme d'une partie des chefs militaires, Daladier et Bonnet tombent d'accord avec Londres pour conseiller aux Tchécoslovaques, le 19 septembre, d'accepter l'annexion et pour les avertir, le 21, qu'en cas de résistance ils ne seraient pas soutenus (il semble prouvé que cet avertissement fut envoyé à la demande du gouvernement tchécoslovaque, lui-même divisé et hésitant, pour convaincre son opinion qu'il fallait céder). Mais, lors d'une nouvelle entrevue avec Chamberlain, le 22 septembre à Godesberg, Hitler accroît encore ses exigences et menace d'envahir la Tchécoslovaquie le 1er octobre. La crise atteint son point culminant le 27 septembre (mobilisation en France). Le 28, Chamberlain propose une conférence ; Hitler, sur le conseil de Mussolini, accepte.
Le 29 septembre à Munich, Hitler, Daladier, Chamberlain et Mussolini signent un accord plaçant les Tchèques devant le fait accompli : 85 000 kilomètres carrés du territoire sont rattachés à l'Allemagne et 3 100 000 Sudètes sont incorporés ; les nouvelles frontières de la Tchécoslovaquie[...]
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Écrit par
- Georges-Henri SOUTOU : professeur d'histoire contemporaine à l'université de Paris-IV-Sorbonne
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