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MUSÉE D'ART ET D'HISTOIRE DU JUDAÏSME, Paris

Le musée d'Art et d'Histoire du judaïsme (MAHJ) a été inauguré le 30 novembre 1998 à Paris, qui se trouve ainsi comme de nombreuses villes (Amsterdam, Berlin, Francfort, Londres, New York, Prague, Tolède, Vienne...) doté d'un musée du judaïsme. Ce nouveau « musée de civilisation » est installé au cœur du Marais, dans l'hôtel de Saint-Aignan.

Le musée, qui bénéficie de 1 300 mètres carrés d'exposition permanente, est largement tributaire de l'histoire et de la géographie du judaïsme en France, de ses deux principales communautés – ashkénaze et séfarade –, de l'émancipation-intégration issue de la Révolution française, de l'affaire Dreyfus. Il prend place dans un pays qui, selon l'historiographie de la Seconde Guerre mondiale, ne fut ni totalement bourreau ni absolument victime, mais l'auxiliaire actif de la Shoah, et s'inscrit tout naturellement dans les mouvements d'anamnèse de la société française vis-à-vis du génocide. À partir des années 1970, grâce à la médiation juive de la « déportation », la France commence, sur fond républicain, à se regarder comme un pays composite, une France qui est passée du Juif selon Jean-Paul Sartre (qui n'existe que sous le regard de l'autre) au Juif selon Emmanuel Levinas (le Juif au miroir d'une culture millénaire) ou selon Georges Perec (l'identité résidant pour lui dans la question sur l'identité).

Ce nouveau musée est autant « lieu de mémoire » que « lieu d'histoire » symbolisé par l'hôtel Saint-Aignan, demeure aristocratique construite en 1650 par l'architecte Pierre Le Muet, qui abritait au début du xxe siècle des familles d'artisans juifs d'Europe centrale, attirés par le rêve français (« heureux comme Dieu en France »). Le principe qui a guidé la restauration, et qui fut adopté au début des années 1980, était de choisir le xviiie siècle comme période de référence. En ce sens, la reconstitution de l’escalier monumental à partir des plans de Le Muet, qui signifie cette France imaginaire, et « le mur des lamentations » de Christian Boltanski, Les Habitants de l'hôtel de Saint-Aignan en 1939, qui évoque les déportés juifs de l'immeuble, constituent les deux pôles monumentaux de l'établissement.

C'est en 1981, à l'occasion de l'exposition au Grand Palais de la collection Strauss-Rothschild du musée de Cluny, que change la perception du patrimoine juif et que s'affirme la nécessité de créer un musée qui succéderait au musée d'Art juif de la rue des Saules créé en 1948 par une association soucieuse de rendre hommage à une culture disparue dans la tourmente de la Shoah. En 1986 un accord est signé entre la mairie de Paris et le ministère de la Culture. L'hôtel de Saint-Aignan, qui appartient à la Ville depuis 1962, est mis à disposition du musée et le financement est assuré à parité par la Ville de Paris et l'État. En 1988, Laurence Sigal est nommée conservateur – un poste qu’elle occupera jusqu’en 2011 –, et le musée devient musée associatif contrôlé par la direction des musées de France. En 1993 enfin, la restructuration des espaces intérieurs est confiée aux architectes François Pin et Catherine Bizouard.

Les collections sont constituées du fonds du musée d'Art juif, et d'un ensemble de dépôts de musées français et étrangers, en tout premier lieu la collection Isaac Strauss ainsi que des stèles funéraires provenant des cimetières juifs parisiens, conservées au Musée national du Moyen Âge, dépôts auxquels se sont ajoutés ceux du Consistoire israélite de Paris, de la Fondation du judaïsme français, et de différents musées français et étrangers.

Depuis la création du musée en 1988, des acquisitions importantes – une soukkah d'origine[...]

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Écrit par

  • : conservatrice du patrimoine à l'Inspection générale des musées, placée auprès du département des collections de la Direction des musées de France

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