MUSIQUE CONTEMPORAINE La musique sérielle et le dodécaphonisme
Le dodécaphonisme de J. M. Hauer
Josef Matthias Hauer, né en 1883 à Wiener-Neustadt, en Autriche, était instituteur. Autodidacte dans le domaine musical, il écrit dès 1911 dans un système à douze sons parfaitement cohérent, qu'il précise en 1918 sous le nom de Zwölftongesetz. Il en expose les principes dès 1920 dans une brochure intitulée VomWesen des Musikalischen (De l'essence du fait musical), qu'il continue à mettre en pratique jusqu'à sa mort en 1959. « Il n'y aura plus, en « musique atonale », écrit-il dans cet ouvrage, de tonique, de dominante, de sous-dominante, de degrés, de résolution, de consonances, de dissonances, mais seulement les douze intervalles égaux d'un espace musical homogène. » Sa « gamme », car on ne peut plus placer ce mot qu'entre guillemets, ne se compose donc que de douze demi-tons tempérés. La mélodie atonale nouvelle éliminera donc avec une intransigeance égale l'émotion physique ou sensuelle au même titre que la vulgarité ou la sentimentalité. La loi immuable de la musique atonale, sa règle d'or, consiste en ce que les douze sons de la gamme tempérée doivent tous être joués et sans cesse repris. Ainsi, le désir manifesté par Hauer de soustraire le discours musical aux lois de la résonance débouche, tout naturellement, sur une ascèse sonore ignorée jusqu'à lui, une ascèse qu'ignorera d'ailleurs Schönberg. Selon les grands principes de la polyphonie hauérienne, un son nouveau ne peut apparaître dans le discours que si celui qui le précède dans la même voix est à distance d'un ton ou d'un demi-ton, supérieur ou inférieur. Ainsi, le son sol, par exemple, doit être précédé, soit d'un fa dièse, soit d'un la, soit d'un sol dièse.
Quatre sons initiaux sont présentés simultanément, formant généralement un accord de septième majeure ou mineure. On a par exemple : do - mi - sol - si. À ce premier complexe en succède un deuxième ne différant du premier que par un son introduit comme il a été dit. Suit un troisième complexe ne différant du deuxième que par un son et ainsi de suite jusqu'à ce qu'on retrouve le premier complexe.
On a ainsi la « série » do, do dièse, ré, la dièse, sol dièse, fa, ré dièse, fa dièse, la, mi, do, sol, si, qui sera à la base de toute l'œuvre.
Les quatre sons de chaque complexe permutent entre eux deux à deux, la ligne mélodique résultant, dans chaque voix, de cette opération devant se lire en suivant les traits qui matérialisent ici cette permutation (do, mi, mi, si pour la voix qui débute par do).
Le système dodécaphonique de Josef Matthias Hauer suscita peu de curiosité à l'époque où il fut conçu, et la vie de son inventeur fut toujours marquée par une grande détresse matérielle. Cependant, par la rigueur de sa pensée, par les possibilités qu'ouvre son système d'écriture à une mécanisation de la composition musicale, il annonce les recherches les plus récentes. « Son idée dominante, dit le musicologue H. H. Stuckenschmidt, qui était de composer une musique désincarnée, à la fois spirituelle et abstraite, et purement atonale, n'a jamais franchi un cercle étroit. Mais sa personnalité comme son art étaient d'un authentique prophète et possédaient une vraie grandeur. »
Parmi ses successeurs, on peut citer Herman Heiss et Jef Golyscheff, auteur de la Zwölftondauermusik (musique dodécaphonique continue).
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Écrit par
- Pierre BARBAUD : chef de projet à l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA)
- Rémi LENGAGNE : ingénieur, Conservatoire national des arts et métiers, assistant du chargé de projet informatique musicale à l'Institut national de recherche en informatique et automatique, Le Chesnay
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Médias
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