NADAR GASPARD-FÉLIX TOURNACHON dit (1820-1910)
Vers d'autres horizons
Au seuil des années 1860, le marché de la photographie est en pleine mutation. Les tenants d'une photographie de qualité, onéreuse et de grand format se voient subitement détrônés par de nouveaux entrepreneurs comme Eugène Disdéri qui, avec le « portrait-carte », divise le prix de revient d'une photographie par six, voire par dix. Le studio de Nadar est une grosse entreprise qui s'éloigne de l'artisanat de la rue Saint-Lazare pour pouvoir tenir tête à la concurrence. Et si Félix délaisse quelque peu le studio, il n'en abandonne pas pour autant la photographie. En 1861, il dépose ainsi un brevet de photographie à la lumière électrique et, en 1862, il réalise des clichés dans les catacombes qui sont exposés à Londres la même année. Mais la photographie le mène vers une nouvelle passion qui va mobiliser toute son énergie pendant près de quinze ans : dès 1858, Nadar a déposé un brevet de photographie aérostatique et réalisé un essai raté de photo aérienne à bord d'un ballon statique. Il renouvelle l'opération dix ans plus tard, cette fois-ci avec plus de succès. Entre-temps, il fonde en 1863 la Société d'encouragement pour la locomotion aérienne et se lance dans la construction du Géant, « ballon gigantesque, destiné à porter quatre-vingts passagers dans une nacelle à deux étages ». À sa deuxième ascension, le 18 octobre, le ballon s'écrase à Hanovre et sera revendu en 1867. Mais Nadar continue encore à voler pendant quelques années.
L'atelier de photographie se voit transféré rue d'Anjou. Nadar, atteint par des ennuis de santé et croulant sous les dettes, se retire petit à petit. En 1874, il prête les locaux qu'il a conservés boulevard des Capucines à un groupe de jeunes artistes encore inconnus qui se nomment Monet, Pissarro, Sisley, Renoir ou Degas pour une exposition de leurs toiles : ce sera le premier Salon des impressionnistes. À partir de 1887, c'est Paul, le fils unique, qui gère l'atelier. Félix, après avoir cédé légalement l'atelier à Paul en 1895, s'installe à Marseille, où il ouvre un nouveau studio de 1897 à 1899. Il rentre à Paris en 1900, où il peut assister à la rétrospective qui lui est consacrée à l'Exposition universelle, et poursuit l'édition de ses Mémoires. Il publie Quand j'étais photographe, reflet de ses activités multiples et variées des années 1850-1860 dans lequel la photographie n'est là que pour circonscrire une période de sa vie. En 1909, Ernestine décède et Nadar se lance dans la rédaction de son Charles Baudelaire intime, en hommage à son ami disparu. Quelques mois après que Blériot eut traversé la Manche en monoplane, Nadar disparaît à son tour, le 20 mars 1910.
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Écrit par
- Paul-Louis ROUBERT : historien de la photographie, maître de conférences à l'université de Paris-VIII
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Médias
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