COMANECI NADIA (1961- )
Un parcours tourmenté
Nadia Comaneci est de nouveau championne d'Europe du concours général en 1977 et en 1978, championne du monde à la poutre en 1978, championne du monde par équipes en 1979.
Quand elle se présente aux jeux Olympiques de Moscou en 1980, la « Petite Fée de Montréal » est devenue une élégante jeune femme : elle a grandi de 10 centimètres depuis 1976, et a pris quelques kilos ; si elle a perdu de son effervescence et de son dynamisme, elle compense ce handicap par une élégante féminité. Cependant, à Moscou, il ne saurait être question de ne pas voir triompher une Soviétique. Malgré une chute aux barres asymétriques, elle peut encore prétendre à la médaille d'or du concours général avant le dernier exercice, le passage à la poutre, son meilleur agrès : pour obtenir le titre, il lui faut une note de 9,95. Malgré une prestation parfaite et spectaculaire (quatre sauts périlleux et une triple vrille en sortie), le jury, semble-t-il aux ordres de Iouri Titov, le tout-puissant président soviétique de la Fédération internationale de gymnastique, ne la crédite, après moult hésitations, que de 9,85. Nadia est médaillée de bronze, derrière deux Soviétiques, Elena Davidova et Natalia Schaposhnikova. Deux médailles d'or (à la poutre et au sol) ne la consoleront pas de cet échec.
Nadia Comaneci met un terme à sa carrière l'année suivante. Mais, à vingt ans, elle n'est pas prête à affronter sa vie de femme, à se lancer dans la vie. Béla Károlyi, qui s'est installé aux États-Unis pour faire de la gymnastique une lucrative industrie, a abandonné son « jouet ». Nadia se refuse à Nicu Ceau̧sescu, le détestable fils cadet du Conducator. Sa vie en Roumanie devient un enfer ; la Securitate la surveille en permanence. On lui accorde certes un visa pour accompagner la délégation roumaine à Los Angeles lors des Jeux de 1984, mais la police secrète roumaine la suit pas à pas en Californie.
Nadia, qui a goûté à la liberté et au mode de vie occidental au cours de sa carrière, étouffe dans la Roumanie des Ceau̧sescu : alors qu'elle aspire à la liberté, tout déplacement à l'étranger lui est interdit. Elle ne peut répondre aux innombrables invitations que son statut de star mondiale lui vaut, encore moins devenir entraîneur de gymnastique à l'Ouest. L'évasion devient une obsession. Celle-ci ressemble à un mauvais roman d'espionnage. Le 26 novembre 1989, aidée par un personnage trouble, Constantin Panait, qui lui extorque 5 000 dollars, elle gagne clandestinement la frontière hongroise, erre dans la nuit, alors que les hommes de la Securitate sont à ses trousses, puis rejoint Vienne. De là, elle part pour les États-Unis, où elle est accueillie triomphalement, alors que le régime du dictateur Ceau̧sescu va s'écrouler.
Pour se reconstruire, Nadia Comaneci devra encore se débarrasser de Panait, qui vit à ses crochets. La jeune femme s'épanouit enfin, se fiance au gymnaste américain Bart Conner, champion olympique aux barres parallèles et par équipes en 1984, qu'elle épousera le 26 avril 1996. Entre-temps, elle était retournée en Roumanie à l'automne de 1994, où elle fut accueillie comme une héroïne nationale. À cette occasion, elle laissa un chèque de 100 000 dollars à la fédération roumaine de gymnastique, pour permettre d'aider des fillettes à s'entraîner et, peut-être, à rêver d'un triomphe olympique semblable au sien.
Nadia Comaneci a obtenu la nationalité américaine en 2001 et a ouvert, avec son époux, un gymnase à Norman (Oklahoma). Elle a mis au monde un garçon, Dylan-Paul, le 4 juin 2006.
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
Classification
Média
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GUERRE FROIDE (notions de base)
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...paroxysme est atteint, naturellement, lors des jeux Olympiques, avec les victoires de l’athlète tchécoslovaque Emil Zatopek, vedette des Jeux d’Helsinki, en 1952, ou bien de la gymnaste roumaine Nadia Comaneci, icône des Jeux de Montréal en 1976, qui passera à l’Ouest quelques années plus tard. -
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