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NAMIBIE

Nom officiel République de Namibie
Chef de l'État et du gouvernement Nangolo Mbumba - depuis le 4 février 2024 (Par intérim.)
Capitale Windhoek
Langue officielle Anglais
Population 2 963 095 habitants (2023)
    Superficie 824 290 km²

      Article modifié le

      L'ancien territoire du Sud-Ouest africain (South West Africa), devenu officiellement Namibie en 1966, présente les traits caractéristiques des espaces coloniaux subsahariens façonnés au xixe siècle : vaste étendue et faible population, sous-développement économique mais points d'intérêt pour les investissements étrangers. L'actuelle république de Namibie, au climat aride et au territoire désertique, comprend toutefois des régions géographiques assez différenciées : désert du Namib sur la façade atlantique, plateaux fertiles à l’intérieur, plaines sablonneuses au nord et désert broussailleux du Kahalari.

      L'indépendance de la Namibie, proclamée en 1990, a mis fin au cas de décolonisation le plus complexe de la seconde moitié du xxe siècle. Une décolonisation finalement réussie, qui est l'aboutissement paradoxal d'une histoire particulièrement agitée et longtemps présentée comme le signe de l'impuissance des Nations unies.

      Namibie : carte physique - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Namibie : carte physique

      Namibie : drapeau - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Namibie : drapeau

      Dès 1946, celles-ci sont saisies de la question du statut international du Sud-Ouest africain. Le problème se révèle d'autant plus complexe qu'il est plus ou moins lié à la question spécifique du régime politique sud-africain et de l'apartheid. Ni l'accumulation des textes juridiques et politiques par les différentes instances de l'O.N.U., ni la lutte armée lancée à partir de 1966 par le mouvement de libération nationale, l'Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (S.W.A.P.O.) ne permettent de dégager un début de solution.

      C'est seulement au tournant des années 1980 que s'esquisse une ouverture diplomatique. Vingt ans après que l'Assemblée générale des Nations unies eut proclamé le droit du Sud-Ouest africain à l'indépendance, la république d'Afrique du Sud admet le principe de l'autodétermination pour cette Namibie qu'elle traitait pratiquement comme sa « cinquième province », et qu'elle avait envisagé à certain moment d'annexer purement et simplement.

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      Il faudra cependant attendre encore plus d'une décennie pour y parvenir, grâce aux accords d'août-décembre 1988 conclus à Genève, Brazzaville et New York sous l'impulsion des États-Unis et de l'U.R.S.S. bien décidés à mettre un terme à cet interminable et dangereux « conflit régional ». L'affaire internationale du Sud-Ouest africain/Namibie est définitivement close depuis 1990. Plusieurs élections multipartites ont eu lieu depuis lors et ont confirmé la place prédominante de la S.W.A.P.O. sur la scène politique. C'est tout cet arrière-plan d'histoire coloniale et diplomatique ambiguë qui, par-delà les problèmes d'ordre économique et politique internes, caractérise la république de Namibie.

      Géographie

      Une géographie « inégale »

      Avec 2,3 millions d'habitants en 2014 pour une superficie de 824 790 kilomètres carrés, la Namibie est un des territoires les plus faiblement peuplé d'Afrique, et dont la répartition de la population est très inégale, pour des raisons tant historiques que naturelles.

      Les paysages namibiens sont, avant tout, caractérisés par la sécheresse. Le courant froid de Benguela combine ses effets à ceux de la haute pression tropicale pour créer le désert côtier brumeux du Namib, un milieu original marqué par des constructions dunaires impressionnantes (parfois de plus de 300 m de haut). Ce désert, large de 80 à 120 kilomètres, est limité vers l'est par un puissant escarpement (souvent plus de 1 000 m de hauteur) qui le sépare des hauts plateaux de l'intérieur. Ceux-ci culminent à plus de 2 000 mètres puis s'abaissent vers la cuvette du Kalahari ; loin d'être humides (300 à 600 mm/an de pluie), ils sont cependant plus propres aux activités humaines que le désert (seulement 30 à 100 mm/an de précipitations). La seule partie suffisamment arrosée du pays est le nord et le nord-est où les paysages naturels sont ceux de la savane africaine et où l'occupation humaine est plus dense. C'est aussi la Namibie des rivières (Cunene – ou Kunene – et Okavango, à la frontière avec l'Angola) où l'agriculture de décrue est possible.

      Mesas (Namibie) - crédits : Hoberman Collection/ Universal Images Group/ Getty Images

      Mesas (Namibie)

      Désert du Namib - crédits : John Chard/ Getty Images

      Désert du Namib

      Au moins 60 % de la population est concentrée dans cette partie nord de la Namibie. Les deux plus importants groupes ethniques du pays, les Ovambos (près de 50 % de la population) et les Kavangos (10 %), occupent cette région. Ces deux groupes bantous pratiquent traditionnellement une agriculture vivrière associée à l'élevage. Les « Capriviens », habitants de l'étroite bande de terre qui relie la Namibie à la vallée du Zambèze, appelée Couloir de Caprivi, sont également bantous et agriculteurs. Par ailleurs, 42 % des Namibiens sont citadins, et vivent en grande majorité à Windhoek, la capitale, qui concentre 325 000 habitants en 2011.

      Diamant - crédits : C. Bevilacqua/ De Agostini/ Getty Images

      Diamant

      Cette très inégale répartition de la population, qui laisse pratiquement vides d'hommes les autres régions du pays, n'est pas due qu'à des facteurs naturels. La colonisation allemande a été particulièrement violente, procédant, au début du xxe siècle, à un véritable ethnocide des populations Herero (Bantous) et Nama (Khoisan) qui occupaient les hautes terres centrales, et cantonnant les populations africaines au nord du pays. En 1920, le Sud-Ouest africain (ancien nom de la Namibie) fut placé sous mandat sud-africain par la Société des Nations. Les richesses minières du pays (diamants, plomb et cuivre) furent exploitées par des capitaux sud-africains, des fermiers afrikaners vinrent s'installer sur les hauts plateaux aux côtés des fermiers allemands. Sur d'immenses ranchs de plus de 10 000 hectares, ils développèrent l'élevage extensif de bovins dans le centre du pays et de moutons karakul au sud. Depuis lors, la Namibie connut une histoire parallèle à celle de l'Afrique du Sud. Dans les années 1950, une politique d'apartheid fut instituée. Les Sud-Africains définirent neuf groupes ethniques « africains » qui furent cantonnés dans des homelands, tous situés sur les basses terres du nord du pays, à l'exception des secteurs de Rehoboth et du Hereroland dans l'est. Le régime d'apartheid namibien fut amendé à la fin des années 1970. Mais à partir de 1974, l'enjeu namibien se doubla de l'enjeu angolais : l'Afrique du Sud, considérant la Namibie comme une zone tampon avec le régime communiste de Luanda, voulait garder le contrôle du territoire. Les Sud-Africains ne cédèrent qu'à la fin des années 1980 et, en mars 1990, la dernière véritable colonie d'Afrique accéda à l'indépendance.

      Une économie dépendante

      Si la Namibie s'est libérée de l'Afrique du Sud sur le plan politique, elle reste un pays pauvre dont l'économie est une des plus dépendantes du continent : la domination sud-africaine demeure toujours d'actualité. Pourtant, les indicateurs sont bons : le taux de croissance annuel du P.I.B. dépasse 4 %, le déficit budgétaire reste modéré, l'inflation est faible (5,1 % en 2014).

      L'économie namibienne repose principalement sur ses ressources naturelles. Les mines constituaient la première activité en part du P.I.B., avec plus de 40 % dans les années 1970, mais cette part s'est réduite à environ 25 % dans les années 2010. Ce sont surtout des sociétés sud-africaines qui contrôlent les mines namibiennes. Au sud, la Consolidated Diamond Mines (C.D.M.), une filiale de la société De Beers, dépendant elle-même de l'Anglo-American Corporation, détenait, jusqu’en 2011, la concession du territoire minier. Mais en 2011, la Namdeb Diamonds Corporation, une société contrôlée à parts égales par le gouvernement namibien et la De Beers, a été constituée pour exploiter le secteur. Cette région détiendrait près d'un cinquième des réserves mondiales de diamant. Mais celui-ci, d'excellente qualité, a surtout profité aux sociétés sud-africaines accusées, après l'indépendance par le nouveau régime, d'avoir épuisé les ressources minières à partir des années 1980. La production est en baisse, au début du xxie siècle, et les recherches sur la plate-forme continentale ne sont pas si prometteuses. Près de Walvis Bay, la mine de Rossing exploite l'uranium. L'exploitation a commencé en 1976, avec des capitaux européens, puis a été contrôlée par les Sud-Africains avant d’être majoritairement détenue par la société anglo-australienne Rio Tinto. La Namibie est devenue le quatrième producteur mondial d’uranium. Enfin, l’exploitation du cuivre subit les aléas des cours de ce minerai, en particulier depuis la fermeture, au début des années 2000, de la mine de Tsumeb.

      Namibie : territoire et activités - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Namibie : territoire et activités

      La dépendance namibienne est tout aussi manifeste dans le secteur bancaire, également dominé par les Sud-Africains – d'autant plus facilement que le dollar namibien est indexé sur le rand sud-africain. Elle est également liée à la faiblesse de la production agricole et industrielle, pratiquement inexistante, mis à part les produits de l'élevage. Ce dernier est aux mains des fermiers blancs dont les quatre mille ranchs occupent encore plus de 50 % des terres exploitables en 2015. Au nord, l'agriculture africaine (productrice essentiellement de céréales) ne dégage pas de surplus. Ainsi, l'essentiel des produits consommés par les Namibiens vient d'Afrique du Sud. Il en va de même, et dans une plus large mesure encore, des produits manufacturés. Enfin, la dépendance est liée à l'orientation du réseau des voies de communication, entièrement tourné vers le voisin méridional. Le rétablissement de la paix en Angola n’a pas encore fait sentir ses effets ; et l'ouverture de la route Trans-Kalahari en 1998 reliant le port de Walvis Bay (seul port en eaux profondes sur 1 500 kilomètres de côtes, restitué en 1994 par l'Afrique du Sud à la Namibie) aux pays enclavés d'Afrique australe et à la région du Gauteng en Afrique du Sud n'a toujours que peu d'effets, même si le trafic est en augmentation. Périphérie économique de l'Afrique du Sud, comme les autres pays membres de l'Union douanière d'Afrique australe (S.A.C.U.), la Namibie n'a donc pas réellement les moyens de conquérir son indépendance.

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      Le tourisme est un atout nouveau, depuis la fin des années 1990. Mais les parcs naturels du nord (le parc d'Etosha, notamment, fondé en 1907 et situé autour d'un lac salé est un des plus grands d'Afrique) et les paysages du désert ne sont accessibles qu'à un tourisme haut de gamme (du fait du coût de l'hébergement et de l'éloignement). La côte, quant à elle, est peu attrayante (courant froid et brumes côtières) et la petite station balnéaire de Swakopmund est avant tout un lieu de détente de fin de semaine pour les habitants de Windhoek, ou de villégiature pour certains Sud-Africains.

      Ce sont les ressources halieutiques qui soutiennent, au début du xxie siècle, l'économie namibienne, dont les centres principaux se sont déplacés des mines vers la côte. Par ailleurs, cette activité est moins dominée par l'Afrique du Sud. L'aide internationale a permis aux Namibiens de développer leur propre flotte et leurs propres industries de transformation du poisson. Le courant froid de Benguela fait de la côte namibienne une des régions les plus poissonneuses du monde. La sardine, l'anchois et la morue constituent l'essentiel des prises. Walvis Bay et Lüderitz sont les principaux ports de pêche.

      Il est difficile, dans ces conditions, de résorber les inégalités sociales encore criantes. Les Blancs (5 % de la population) contrôlent encore une large part de l'économie ; les anciens bantoustans restent des enclaves de pauvreté à l'écart des circuits économiques ; dans les villes, les quartiers des non-Blancs sont paupérisés ; plus de 30 % de la population du pays est sans emploi en 2014. À cela s'ajoutent des scandales politico-financiers qui attestent d'un problème de corruption de plus en plus fort au sein de la S.W.A.P.O. au pouvoir. Durant la présidence de Hifikepunye Pohamba (ancien ministre et vice-président de la S.W.A.P.O.), de 2005 à 2014, la politique économique du pays est moins libérale : des interventions de l'État plus fortes en faveur des plus démunis et une réforme foncière sont engagées avec l’accord et le soutien financier de l’Allemagne et du Royaume-Uni. Par ailleurs, le drame de la pandémie de sida (près de 25 % des 15-49 ans seraient affectés, et l'espérance de vie à la naissance a chuté de 61 à 52 ans entre 1991 et 2014) explique la faible croissance démographique annuelle (à peine plus de 1,4 % en 2014) et met en cause la possibilité même d'un véritable décollage économique. Le gouvernement fonde ses espoirs sur le développement de l’exploitation offshore de gaz naturel (gisement de Koudou, au large de la ville d’Oranjemund) et sur la très probable exploitation du pétrole dans la même zone géographique. Toutefois, l’exemple du voisin angolais démontre que la richesse tirée de ces ressources ne conduit pas nécessairement au mieux-être du plus grand nombre.

      — Philippe GERVAIS-LAMBONY

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      Écrit par

      • : professeur agrégé à l'université d'Aix-Marseille-III, ancien doyen de la faculté de droit et des sciences économiques de l'université de Madagascar
      • : professeur à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense
      • : professeur associé à l'université du Sussex (Royaume-Uni), membre de l'Institut d'études en développement
      • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

      Classification

      Médias

      Namibie : carte physique - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Namibie : carte physique

      Namibie : drapeau - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Namibie : drapeau

      Mesas (Namibie) - crédits : Hoberman Collection/ Universal Images Group/ Getty Images

      Mesas (Namibie)

      Autres références

      • NAMIBIE, chronologie contemporaine

        • Écrit par Universalis
      • AFRIQUE (Histoire) - Les décolonisations

        • Écrit par
        • 12 429 mots
        • 24 médias
        ...économique, à cause de ses richesses minières – diamants, uranium, métaux rares –, l'ancienne colonie allemande du Sud-Ouest africain, rebaptisée Namibie par l'O.N.U. en 1967, avait été placée sous mandat sud-africain à l'issue de la Première Guerre mondiale. Mais la république d'Afrique du Sud...
      • AFRIQUE AUSTRALE

        • Écrit par
        • 6 102 mots
        • 5 médias
        ...mise à profit, sous la forme de larges investissements dans les secteurs de l'éducation et de la santé et d’une réelle politique de redistribution. La Namibie, bien que dépendante des ressources minières, a su développer un secteur touristique florissant ; son économie est stable et ouverte et son revenu...
      • ANGOLA

        • Écrit par , et
        • 8 814 mots
        • 6 médias
        ...de règlement du conflit angolais. Une solution, dite liée, se dessine, en effet, entre les divers protagonistes, et l'Afrique du Sud accepte d'octroyer l'indépendance à la Namibie en 1990, en échange de la garantie du retrait des troupes cubaines d'Angola. Poussés par leurs alliés respectifs, le M.P.L.A....
      • APARTHEID

        • Écrit par et
        • 9 064 mots
        • 8 médias
        ...première brèche dans le camp des États « de la ligne de front ». La brèche s'est élargie avec les accords de New York (décembre 1988), signés entre l'Afrique du Sud, l'Angola et Cuba, qui conduisent à l'indépendance de la Namibie (mars 1990) devenue État multiracial après avoir connu l'apartheid.
      • Afficher les 18 références

      Voir aussi