Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

NANOSOURCES DE COURANT

Pour que la spintronique (l'électronique de spin, qui remplace la charge de l'électron par son état de spin comme messagère d'information) révolutionne vraiment l'électronique jusque dans ses applications journalières, on doit mettre au point des sources de courants qui resteront polarisés sur des distances non microscopiques et à des températures normales. Un dispositif original pouvant mener à la réalisation d'une telle source a été récemment conçu par des physiciens français de l'Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg, en collaboration avec des chercheurs italiens, suisses et allemands. Ils ont en effet découvert que l'interface entre du cobalt et les molécules d'un pigment bleu ou vert couramment utilisé pour les encres (du phthalocyanine) ne laisse passer que les électrons dont le spin est orienté selon une direction bien précise. Pour obtenir ce résultat, les chercheurs ont d'abord déposé des molécules de phthalocyanine sur la surface d'un cristal de cobalt. En le soumettant à un rayonnement X issu du synchrotron Soleil (à Saclay dans l'Essonne), ils ont mesuré une forte polarisation des électrons arrachés de la surface par cette lumière ; ils ont, en outre, compris par un calcul quantique que cela était dû à la formation d'orbitales moléculaires hybrides entièrement polarisées en spin, lors de l'adsorption des molécules du colorant sur le cobalt. La mesure du moment magnétique des atomes d'azote contenus dans la phthalocyanine a confirmé ce résultat. Cette interface polarisée en spin, ou « spinterface », possède les propriétés d'une source idéale de courant polarisée en spin idéale. En effet, la forte polarisation en spin du courant sortant provient du magnétisme du cobalt ; comme cet effet ne nécessite qu'une seule molécule, on peut envisager de l'utiliser pour fabriquer des nanodispositifs performants. De plus, elle se révèle très peu affectée par des contraintes thermiques éventuelles. L'article décrivant ces résultats est paru dans la revue Nature en février 2013 ; un brevet d'invention a aussi été déposé.

— Bernard PIRE

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

Classification