NANOTECHNOLOGIES (enjeux et risques)

Peut-on évaluer correctement les risques associés aux nanomatériaux ?

Cette question est actuellement de première importance et fait l'objet des travaux de divers groupes nationaux, européens (Schennir de la D.G. Sanco) et internationaux (O.C.D.E.). Ils travaillent actuellement sur des stratégies d'évaluation des nanoparticules et nanotubes, en particulier dans le cadre de l'application du règlement européen REACH (Registration, Evaluation and Authorization of Chemicals). Cependant, l'obligation d'évaluation et d'enregistrement des produits chimiques ne s'applique qu'aux productions supérieures à une tonne par an et par fabricant et un dossier de sécurité chimique n'est exigé qu'à partir de 10 tonnes, ce qui est mal adapté aux productions de nanoparticules, souvent fabriquées en faibles tonnages. Ainsi que le remarque le Conseil économique et social, il est important que le règlement REACH puisse s'adapter aux nanotechnologies. Aucune stratégie n'est actuellement définitivement acceptée, mais différentes mesures spécifiques devraient être rapidement demandées afin de pouvoir faire une évaluation correcte des risques potentiels.

Ces mesures concernent la nécessité d'une caractérisation physicochimique très soigneuse des nanoparticules et nanotubes en relation avec la taille et une adaptation des tests in vivo et in vitro utilisées en toxicologie des produits chimiques pour une bonne évaluation toxicologique. La question de l'évaluation bénéfice/risque de ces nouvelles technologies a été largement abordée dans le groupe 3 « Préserver la santé et l'environnement tout en stimulant l'économie » du Grenelle de l'environnement (2007). Une procédure de déclaration systématique de la production et de l'importation des nanoparticules a été proposée avec une obligation d'étiquetage de produits contenant des nanoparticules. Ces propositions ont été retenues et devraient être reprises au niveau législatif. Cependant, sans une bonne évaluation des expositions en condition réelle et une bonne connaissance du cycle de vie des nanomatériaux, l'évaluation des risques professionnels et environnementaux reste hasardeuse.

Enfin, il est très important de développer le débat public afin que les différents acteurs de la société prennent connaissance des enjeux scientifiques, économiques, sociétaux et éthiques. Diverses initiatives ont été prises en France au cours des dernières années : conférences citoyennes, Nanoforum organisé par le C.N.A.M., divers colloques et conférences. Un débat national à propos des bénéfices et des risques des nanotechnologies a été proposé par le Grenelle de l'environnement et a été repris dans le projet de loi Grenelle. Ce débat doit toucher un public large et il pourrait être organisé par la Commission nationale du débat public afin qu'il dépasse l'habituelle confrontation entre spécialistes et militants. D'un point de vue général, le Conseil économique et social insiste sur cette nécessaire démarche d'information et de communication pour un sujet complexe, très technique mais porteur d'enjeux essentiels pour le monde futur.