NAPOLÉON, film de Abel Gance
Faut-il le préciser, Napoléon d'Abel Gance (1889-1981), le seul film français muet connu aujourd'hui aux États-Unis, est un monument de l'histoire du cinéma. Il est l'équivalent hexagonal (et même corse) de Naissance d'une nation (1915), le célèbre film fondateur des États-Unis de D. W. Griffith. La démesure des moyens (plus de cent mille mètres de pellicule enregistrée, un millier de figurants, trois caméras enregistrant des images distinctes ou combinées), la durée de réalisation du film, qui s'étale de 1925 à 1926, son montage final présenté le 7 avril 1927 à l'Opéra de Paris attestent du caractère hors norme de cette œuvre protéiforme. Quand le cinéaste se lance dans cette épopée, il a déjà une dizaine d'années d'expérience, mais il n'a pu s'exprimer librement qu'avec La Roue, autre film fleuve de 1921, distribué après de multiples péripéties en 1923. Il écrit alors une série de six, puis huit scénarios consacrés à l'empereur dont il ne réalisera que les premiers épisodes. Le triomphe de Napoléon suscitera de nombreuses polémiques (« Un Bonaparte pour apprentis fascistes », commente en 1927 Léon Moussinac, le critique de cinéma de L'Humanité), mais offrira à Abel Gance l'admiration de D. W. Griffith et de Charlie Chaplin.
Une œuvre irréalisable
Du scénario fleuve initial en huit parties, allant de l'école militaire de Brienne au rocher de Sainte-Hélène, Abel Gance n'a réalisé que les trois premières, décomposées en six périodes :
– La jeunesse de Bonaparte à Brienne où le jeune Corse fait preuve de ses talents de tacticien lors d'une bataille de boules de neige entre collégiens. La jeune Violine, fille du cuisinier, est amoureuse de lui.
– Neuf ans plus tard, au club des Cordeliers, Rouget de Lisle interprète La Marseillaise, reprise en chœur par l'assemblée. Bonaparte le remercie « pour la France ».
– Bonaparte retourne en Corse. Il est poursuivi par les troupes de Paoli, allié des Anglais. Il s'échappe en affrontant une tempête pendant qu'une autre tempête se déchaîne à la Convention. Les Girondins sont envoyés à l'échafaud.
– Nommé capitaine, Bonaparte prépare le siège de Toulon insurgé et s'empare du fort.
– Les épisodes suivants décrivent la Terreur, la rencontre avec Joséphine de Beauharnais, l'assassinat de Marat par Charlotte Corday. Nommé général d'infanterie, Bonaparte sauve les dirigeants révolutionnaires menacés par la foule affamée. Le « général Vendémiaire » assiste au bal des Victimes où il retrouve Joséphine. Il fait ses adieux à la Révolution dans l'enceinte de la Convention, où les fantômes de Robespierre, Danton, Saint-Just, Marat lui apparaissent.
– Bonaparte réorganise l'armée en Italie du Nord en s'imposant à l'état-major d'Augereau et de Masséna. L'armée des révolutionnaires en haillons devient la « Grande Armée » et entre dans l'épopée.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Michel MARIE : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
Classification
Autres références
-
GANCE ABEL (1889-1981)
- Écrit par Jean-Pierre JEANCOLAS
- 1 563 mots
- 1 média
...l'Allemand Hugo Stinnes, qui ont créé une entreprise de production, la Westi Film Gmbh, qui s'est associée à d'autres producteurs, dont Pathé. Le tournage de Napoléon commence en janvier 1925. Interrompu par la mort de Stinnes et l'effondrement de son empire, il reprend de janvier à août 1926 avec une ambition... -
PARLANT (CINÉMA) - (repères chronologiques)
- Écrit par Michel CHION
- 3 201 mots
1899 États-Unis. The Astor Tramp, « picture song » de Thomas Edison. Bande filmée destinée à être accompagnée d'une chanson chantée en salle (derrière l'écran) par des artistes invités.
1900 France. Présentation par Clément Maurice du Phono-Cinéma-Théâtre à l’'Exposition universelle....