NATHAN LE SAGE, Gotthold Ephraim Lessing Fiche de lecture
Poème dramatique en cinq actes et en vers, Nathan le Sage fut écrit par l'Allemand Gotthold Ephraim Lessing (1729-1781) entre novembre 1778 et mars 1779. Dans cette pièce marquée par l'esprit des Lumières, l'auteur riposte aux attaques dont il avait fait l'objet de la part de pasteurs dogmatiques luthériens après la publication d'écrits théologiques dans lesquels il exprimait son esprit de tolérance (L'Anti-Goeze, 1778). Interdit de réponse par la censure, Lessing choisit alors le terrain du théâtre.
Les trois monothéismes
L'action se déroule à Jérusalem durant la troisième croisade, à la fin du xiie siècle. Rentrant de voyage, le juif Nathan apprend que sa fille Recha aurait péri dans l'incendie qui a ravagé sa maison sans l'intervention d'un jeune Templier, amené comme prisonnier à Jérusalem et gracié par le sultan Saladin en raison de sa ressemblance avec Assad, frère disparu du sultan. Recha ignore qu'elle n'est pas la véritable fille de Nathan, mais une chrétienne qu'il a recueillie après que sa femme et ses sept fils eurent été assassinés par les chrétiens. Nathan veut remercier le jeune Templier. Mais, manifestement, celui-ci ne souhaite pas se rendre à l'invitation d'un juif. Pourtant Nathan parvient à le rencontrer. Par ses propos ouverts et tolérants qui impressionnent le Templier, il le décide à rendre visite à Recha : « Méprisez mon peuple autant qu'il vous plaira. Ni vous ni moi n'avons choisi notre peuple. Sommes-nous notre peuple ? Qu'est-ce que cela veut dire, peuple ? Le chrétien et le juif sont-ils chrétien et juif avant d'être homme ? »
Une seconde action vient se greffer sur celle-ci. Saladin, ruiné par ses largesses, a besoin d'argent. Il décide de solliciter Nathan et, sur les conseils de sa sœur Sittah, tente de lui tendre un piège : il lui demande quelle est pour lui, du christianisme, du judaïsme et de l'islam, la vraie religion, pensant ainsi mettre sa sagesse à l'épreuve et le contraindre à parler contre l'islam ou à se renier. Mais Nathan répond par la parabole des trois anneaux empruntée au Décaméron de Boccace : ne pouvant décider auquel de ses trois fils il remettra l'anneau qui lui donnera la préséance sur les deux autres, un père, avant de mourir, fait confectionner trois anneaux identiques. Après sa mort, les fils se disputent, chacun étant convaincu de son bon droit, et font appel à un juge. Celui-ci se déclare incapable de prononcer une sentence : les trois fils sont égaux devant Dieu. À chacun d'eux d'imiter « l'amour incorruptible et libre de préjugé » du père qui s'est refusé à trancher. À la suite de cet entretien, une amitié naît entre Nathan et Saladin.
Entre-temps, le Templier a rencontré Recha dont il est tombé amoureux et qu'il veut épouser. Mais Nathan refuse de donner son consentement. Il soupçonne l'existence d'un lien de parenté entre la jeune fille et le Templier. Daja, une chrétienne, dame de compagnie de Recha, avoue à ce dernier les véritables origines de la fille adoptive de Nathan. Le Templier demande alors conseil au Patriarche de Jérusalem, sans révéler l'identité de Nathan et de la jeune fille. Mais le Patriarche à tôt fait de comprendre de qui il s'agit. Il cherche à profiter de la situation pour provoquer la perte de Nathan, qu'il juge coupable d'avoir détourné une chrétienne de sa foi. Cependant, ses machinations provoquent malgré lui une fin heureuse : le moine qu'il utilise comme espion avoue avoir confié jadis Recha qui était orpheline à Nathan ; grâce à lui, Nathan apprend également que le Templier est le frère de Recha. Tous deux sont aussi les enfants d'Assad, le frère mort de Saladin. Ainsi, à la fin, juifs, chrétiens et musulmans, bien qu'élevés dans des confessions différentes, se trouvent réunis dans une même famille, sous l'autorité[...]
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Écrit par
- Jean-Louis BESSON : professeur au département des arts du spectacle à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-la Défense, traducteur, dramaturge
Classification
Média
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