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NATIONALISATION

Le régime juridique des nationalisations

La nationalisation est un acte de souveraineté. Mais elle doit, comme tous les actes de la puissance publique, respecter le droit interne et le droit international.

Les nationalisations et le droit interne

Le droit interne des États prévoit, souvent, la possibilité de procéder à des nationalisations et détermine, au moins sommairement, leur régime juridique. Ce régime comporte deux aspects : la réglementation du pouvoir de nationaliser et la fixation des règles relatives à l'indemnité. Le cas de la France est, à cet égard, topique.

Le pouvoir de nationaliser

La question revêt, là encore, deux aspects : qui peut nationaliser, et dans quelles conditions ?

La nationalisation est, en principe, opérée par une loi. Il peut arriver, cependant, que les transferts soient décidés par des actes du pouvoir exécutif sur la base d'une loi qui pose le principe de la nationalisation d'un secteur déterminé. Cette dernière méthode a, par exemple, été suivie pour la nationalisation des industries d'armement, en France, en 1936 (la loi du 11 août 1936 donne au gouvernement les pleins pouvoirs pour procéder à la nationalisation des entreprises de fabrication du matériel de guerre, jusqu'au 31 mars 1937).

Il s'agit alors de savoir si l'État dispose, dans l'ordre juridique interne, en la matière, d'un pouvoir totalement discrétionnaire ou, au contraire, conditionné. La question se double, dans cette dernière hypothèse, de celle de savoir qui est investi de la fonction de contrôler le respect des conditions posées à la licéité d'une nationalisation. La réponse est variable suivant les constitutions des États.

Lorsque existe une cour suprême, chargée de contrôler la constitutionnalité des lois, les nationalisations donneront lieu à un contrôle réel. C'est ainsi que la Cour suprême de l'Union indienne a déclaré inconstitutionnelle la nationalisation des banques opérée par la loi.

De manière générale, les tribunaux, à moins qu'ils ne disposent du pouvoir de contrôler la constitutionnalité des lois par voie d'exception, ne peuvent que tirer les conséquences d'une loi de nationalisation.

Les dernières nationalisations opérées en France ont donné l'occasion au Conseil constitutionnel de contribuer de manière importante à la théorie des nationalisations. En effet, le premier texte voté par le Parlement le 18 décembre 1981 a été déclaré contraire à la Constitution dans une décision du 16 janvier 1982 qui a déterminé les principes applicables en droit français. Ces principes reposent sur l'idée que la nationalisation doit être assimilée à l' expropriation, dont elle n'est qu'une forme particulière, comme l'admet la conception anglo-saxonne.

La nationalisation doit donc respecter les principes fondamentaux du droit de l'expropriation. Cependant, le Conseil constitutionnel a retenu une seconde idée qui limite le pouvoir de nationaliser : celle d'une « constitution économique » de la France, qui veut que les principes fondamentaux de la propriété privée des moyens de production et de la liberté d'entreprise aient une valeur constitutionnelle. Il en résulte les deux règles suivantes :

– comme toute expropriation, la nationalisation, pour être licite, doit être nécessaire. La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de 1789, dispose, en effet, que l'expropriation ne peut avoir lieu que pour cause de « nécessité publique ». Le Conseil constitutionnel a jugé que la situation de crise économique justifiait, au regard de cette règle, les nationalisations décidées par le législateur, en l'absence d'erreur manifeste d'appréciation ;

– en tout état de cause, quels que soient les motifs invoqués, les nationalisations ne doivent pas entraîner des transferts d'une importance[...]

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Écrit par

  • : maître des requêtes au Conseil d'État
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