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SACHS NELLY (1891-1970)

Nelly Sachs - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

Nelly Sachs

Tant par ses poésies que par ses poèmes scéniques, Nelly Sachs n'a cessé d'analyser et de commenter le calvaire du peuple juif : elle se sentait intimement liée à ce peuple, jusque dans son propre destin.

Nelly Sachs naît à Berlin. Quoique attirée par la danse, elle choisira de s'exprimer par le mot. En 1940, à l'ultime moment donc, Selma Lagerlöf et quelques autres amis parviennent à l'arracher au IIIe Reich. Une longue maladie succède alors aux sévices qu'elle a endurés. Une fois guérie, Nelly Sachs se met à traduire la littérature du pays qui l'accueille (la Suède) et à consigner, peu à peu, « ce qui fut son lot » en Allemagne. Parmi nombre de distinctions, elle reçoit, avec Agnon, en 1966, le prix Nobel de littérature. Elle est morte à Stockholm.

Bien qu'ayant commencé de bonne heure à écrire — ses premiers textes sont en tout point romantiques —, Nelly Sachs n'atteint qu'à partir de la guerre la pleine maturité de son talent. Son premier volume de poèmes, Dans les demeures de la mort (In den Wohnungen des Todes), paraît en 1946 à Berlin-Est : y sont déjà présents tous les thèmes auxquels elle accordera dorénavant son attention. En fait, dit son commentateur Andersch Enzensberger, elle n'a jamais cessé de travailler à un seul ouvrage, et la poésie fut pour elle une manière de prière. En effet, dans sa description des tourments concentrationnaires, qu'elle évoque dans L'Obscurcissement des étoiles (1949), c'est moins une accusation qui retentit qu'une lamentation ; par-delà l'horreur vécue s'édifie un ordre neuf, sacré, où la haine n'a point sa place ; un jour, un monde viendra qui sera sans passé et que seule aura permis d'atteindre une fuite dans « cela qui ignore la poussière ». À ce thème est étroitement lié celui de la transformation — pour Nelly Sachs, le signe de la condition humaine ; la chrysalide devient papillon, mais, moins que le résultat, c'est le processus qui compte ici. La poétesse ne cesse d'évoquer une « démarche », un « mouvement », une « recherche » : la découverte, elle, demeure incertaine.

Bien que la poésie de Nelly Sachs semble être d'un abord difficile, elle n'use point d'hermétisme. Les rythmes carrés, choraux, rappellent la Bible, à laquelle la rattache également le choix des métaphores — l'Apocalypse, en particulier, devait lui servir le modèle. Elle puise l'inspiration de la mystique juive transmise par Martin Buber et Gerschom Scholem pour écrire les quatorze poèmes scéniques du cycle Élie. Mystère des souffrances d'Israël (1951) ; l'un d'eux, Élie, fut diffusé à la radio en 1958. Et si « la dernière poétesse juive de langue allemande » y traite toujours d'un homme en fuite (Fuite et Transformation, 1959 ; Fuite vers le pur, 1961), elle ne lui refuse point l'espoir en un avenir meilleur : son dernier recueil a pour titre Nuit, écarte-toi (Teile dich, Nacht, 1970). Signes sur le sable (1962) réunit ses poèmes scéniques écrits entre 1955 et 1962.

— Lore de CHAMBURE

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Nelly Sachs - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

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  • SHOAH LITTÉRATURE DE LA

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    Et bien sûr, Nelly Sachs, écrivant de son exil en Suède et Paul Celan de son exil à Paris, tous deux dans la langue défigurée, dénaturée par les assassins, liés par leur destin de survivants, ayant perdu les êtres chers dans l'extermination, se font les chantres d'un deuil impossible, devenus avec...