NÉO-PLATONISME
Les maîtres néo-platoniciens
Il n'est pas possible de nommer ici tous les membres connus de l'école. On se limitera aux plus grands. De Plotin, le fondateur, penseur puissant, mais désordonné dans son écriture, l'œuvre entière a été conservée, divisée par son disciple Porphyre en cinquante-quatre traités ou six neuvaines (en grec : ennéades).
Porphyre (233-305) est un personnage complexe. Il semble avoir eu de la peine à concilier sa fidélité à Plotin et son admiration pour Aristote et les Oracles chaldaïques. La plus grande partie de son œuvre métaphysique est perdue. En 1968, Pierre Hadot (Porphyre et Victorinus) s'est efforcé d'en reconstituer les lignes maîtresses à travers son disciple Marius Victorinus. Plus éclectique que son maître, Porphyre serait à l'origine de ce qu'on a appelé improprement le « néo-platonisme latin », celui d'Augustin, de Boèce et du Moyen Âge. Jamblique (mort vers 330) est un élève de Porphyre. Néo-pythagoricien, mais aussi fervent adepte du paganisme en son déclin, il réagit contre le « rationalisme » qu'il croit percevoir chez Plotin, et il introduit dans le néo-platonisme la justification de la théurgie (ensemble de rites inspirés par la divinité pour nous unir à elle, comme les sacrements chrétiens). Son principal ouvrage est le traité des Mystères d'Égypte. On a signalé les œuvres maîtresses de Proclos (412-485), élève de Syrianos à Athènes. C'est le plus méthodique et le plus « classique » des néo-platoniciens. Damascios, qui est le dernier maître de l'école d'Athènes, naît vers 485. Il se distingue par son sens critique et son acuité d'esprit. On a dit qu'en criblant de questions ses prédécesseurs il minait le néo-platonisme. Plus exactement, il l'accomplit comme problème. Son grand ouvrage est intitulé : Dubitationes et solutiones. Après Damascios, il faut attendre le xie siècle pour trouver un néo-platonicien de premier plan en Jean Scot dit Érigène (810-870). Cet Irlandais, qui passe une grande partie de sa vie à Paris, réinvente les intuitions les plus profondes du néo-platonisme en méditant le Pseudo-Denys (disciple de Proclos), Maxime le Confesseur et quelques autres Pères de l'Église. Il brosse une vaste fresque métaphysique à la fois néo-platonicienne et chrétienne dans son De divisione naturae.
Il n'y aura plus ensuite que des résurgences néo-platoniciennes mineures : celle des mystiques allemands du xive siècle, comme Eckhart et Tauler ; celle des humanistes de la Renaissance au xve siècle avec Marsile Ficin (éditeur de Plotin en Occident) et Nicolas de Cues ; celle de l'école oratorienne du xviie siècle avec Gibieuf et Thomassin.
Au début du xxe siècle, Henri Bergson a contribué au renouveau des études plotiniennes en consacrant à Plotin ses cours au Collège de France. Mais, si Plotin n'est plus tout à fait inconnu, il reste un immense travail à accomplir pour rendre accessibles les autres néo-platoniciens.
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Écrit par
- Jean TROUILLARD : professeur honoraire à l'Institut catholique de Paris
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