- 1. Le cadre naturel
- 2. Les premiers villages préagricoles entre 10000 et 8300 avant J.-C.
- 3. L'apparition de la production de subsistance (8300 à 7500 av. J.-C.)
- 4. Les villages d'agriculteurs-éleveurs de 7500 à 6600 avant J.-C.
- 5. La fin du VIIe millénaire : achèvement et expansion de la néolithisation
- 6. Bibliographie
NÉOLITHISATION Proche-Orient et Turquie orientale
Les premiers villages préagricoles entre 10000 et 8300 avant J.-C.
C'est en Palestine qu'il est prouvé que les premiers villages ont réellement inauguré la néolithisation, avant tous les autres caractères progressivement impliqués par elle, avant notamment la production de subsistance, longtemps prise pour le phénomène premier. Ces villages apparaissent au sein de la civilisation natoufienne, qui occupe, entre 10000 et 8300, un vaste territoire allant du moyen Euphrate au delta du Nil. Elle est caractérisée, techniquement, par un outillage microlithique géométrique où prédominent les segments de cercle, avec des lames faucilles, de la vaisselle de pierre et du matériel de broyage requis par la consommation des céréales.
Par leur habitat, les Natoufiens sont bien à la charnière entre deux mondes : d'une part, ils utilisent encore les abris naturels où ils succèdent directement à leurs devanciers du Paléolithique supérieur (« Kébariens »), mais on note une tendance générale, sur le littoral palestinien ou dans le désert de Judée, à déborder de l'espace abrité initial, pour occuper la terrasse s'étendant devant lui, fût-ce en l'aménageant avec des « murs » de gros blocs (El Wad), ou en taillant ses pentes pour y creuser des abris (Nahal Oren). D'autre part, c'est aussi à l'époque natoufienne qu'apparaissent les premiers villages permanents construits en plein air sur des sites entièrement nouveaux.
Ces villages sont des agglomérations de cabanes à demi enterrées dans des fosses rondes. L'exemple le plus révélateur, celui de Aïn Mallaha, sur le lac Houlé, montre l'aménagement soigné de l'intérieur des fosses : un « mur » de dalles dressées ou de pierres sèches en maintient la paroi ; on trouve des enduits muraux, parfois peints, des sols dallés et enduits ; une rangée circulaire de forts poteaux retrouvés à l'intérieur d'une maison montre qu'une robuste charpente devait maintenir les superstructures émergeant de la fosse, soutenant sans doute un toit de pisé. Bref, il s'agit bien de maisons et non d'abris légers, encore que, sans grande expérience de la maçonnerie, les bâtisseurs aient ignoré les véritables murs bâtis en pierre ou en brique. Des villages semblables ont été signalés dans le Néguev (Rosh Zin, Rosh Horesha), dans le sillon du Jourdain (base de Jéricho) et sur le moyen Euphrate (base de Mureybet et d'Abu Hureyra).
À l'est de la Syrie, hors donc des limites culturelles du Natoufien, un seul « village », assez mal connu, remonterait à cette époque : Zawi Chemi Shanidar, sur le haut Tigre.
Or, nulle part, la moindre trace d'agriculture ni d'élevage n'est encore constatée, bien que les villages natoufiens soient sédentaires. Un élevage étonnamment précoce du mouton, proposé pour Zawi Chemi, a été contesté : il semble ne s'agir que d'une chasse préférentielle dirigée vers le mouton sauvage, une préférence semblable existant chez les Natoufiens pour la gazelle. On note, en revanche, que tous ces villages sont implantés à la charnière de plusieurs zones écologiques : ils sont en plaine mais au pied des montagnes, au bord de lacs ou de cours d'eau permanents, afin qu'aux céréales et ongulés des steppes, propres à l'ensemble de leur zone, s'ajoutent toutes les ressources aquatiques, très utilisées alors, et les gibiers forestiers. Le mode de vie est en effet fondé sur une économie dite à large spectre, la permanence de l'habitat étant rendue possible par un riche éventail de ressources variées bien étalées sur l'ensemble de l'année.
Si cette « sédentarité » n'est pas nouvelle (elle peut exister au Paléolithique), le phénomène sociodémographique qui fait coexister de façon permanente un plus grand nombre d'habitants sur un même site, motivant dès[...]
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Écrit par
- Jacques CAUVIN : directeur de recherche au C.N.R.S.
- Marie-Claire CAUVIN : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur de la mission de Cafer Höyük et de préhistoire anatolienne du ministère des affaires étrangères
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