- 1. Le cadre naturel
- 2. Les premiers villages préagricoles entre 10000 et 8300 avant J.-C.
- 3. L'apparition de la production de subsistance (8300 à 7500 av. J.-C.)
- 4. Les villages d'agriculteurs-éleveurs de 7500 à 6600 avant J.-C.
- 5. La fin du VIIe millénaire : achèvement et expansion de la néolithisation
- 6. Bibliographie
NÉOLITHISATION Proche-Orient et Turquie orientale
L'apparition de la production de subsistance (8300 à 7500 av. J.-C.)
La fin du IXe millénaire n'apporte aucune modification importante, sinon l'apparition des premières pointes de flèches dans les industries du Levant encore microlithiques suivant immédiatement le Natoufien. Une mutation profonde s'ébauche en revanche au début du VIIIe millénaire avec les premières expériences agricoles dans les villages syro-palestiniens de chasseurs-cueilleurs.
On trouve alors à Jéricho, au Prepottery Neolithic A (P.P.N.A.), comme à Tell Aswad, en Damascène, du blé amidonnier domestique. C'est à la même époque, à partir de 7700 environ, que la palynologie détecte à Mureybet l'existence des premiers « champs », c'est-à-dire de concentrations artificielles de céréales au voisinage même du village ; au même moment, la pêche y est abandonnée et les chasseurs poursuivent certaines espèces seulement d'ongulés (bœufs et ânes sauvages) plus rentables alimentairement que les gibiers plus petits et variés poursuivis au Natoufien. Il y a donc un bouleversement des stratégies alimentaires dans leur ensemble ; un choix humain s'effectue parmi des ressources brutes exploitées jusque-là de façon assez indifférenciée, et un début d'agriculture apparaît à ce moment.
L'existence de ce choix montre que l'agriculture n'est pas née sous la pression d'une pénurie de ressources spontanées, ni d'un accroissement démographique global les rendant insuffisantes, comme l'affirmait Lewis Binford (1931-2011). Les gisements de l'époque sont, au contraire, plus rares qu'au Natoufien, d'une part à cause de l'abandon des grottes, mais aussi parce que la superficie des villages eux-mêmes, jusque-là limitée au plus à 2 000 ou 3 000 mètres carrés, s'étend brusquement : à Jéricho P.P.N.A., à Mureybet ou Cheikh Hassan, les superficies occupées avoisinent alors trois hectares. Un phénomène démographique existe donc, mais il consiste dans un regroupement humain en communautés plus étendues et plus denses que naguère.
Que sont ces villages ? Les maisons en fosses rondes persistent mais, tandis qu'y apparaissent partout de véritables murs de pierres ou de briques crues liées par du mortier, le tissu villageois, naguère assez lâche et dispersé, se resserre grâce à de nombreuses contiguïtés entre maisons voisines (ainsi à Nahal Oren P.P.N.A. ou à Mureybet), le plan des maisons rondes se perfectionne et se divise, à Mureybet, en multiples cellules que séparent des murets droits, tandis qu'à Jéricho apparaissent des constructions monumentales (tour ronde, « remparts ») dénotant l'exercice d'un travail collectif, intéressant tout le village. Il est probable que l'agriculture ait eu la même signification que cette monumentalité en architecture, c'est-à-dire ait reflété à l'origine, plutôt qu'une nécessité économique, l'apparition de types nouveaux d'organisation du travail et de la société villageoise elle-même, en expansion démographique.
Dans le domaine technique, les premières poteries connues apparaissent vers 7700 sur le moyen Euphrate : mais ce sont de très petits vases, encore rares et sans lendemains immédiats. L'invention, importante, de la terre cuite sert à façonner des petits objets géométriques (disques, cylindres) et surtout des figurines féminines, première apparition au Proche-Orient du thème de la déesse de la Fécondité qui connaîtra une vaste diffusion dans l'Orient méditerranéen.
La pierre polie reste d'abord limitée, comme au Natoufien, à des objets non utilitaires (bâtons polis de Mureybet). Les premières haches polies n'apparaissent que vers 7600 sur les sites du moyen Euphrate.
Qu'en est-il dans le Zagros, jusque-là peu concerné par le développement des villages ?[...]
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Écrit par
- Jacques CAUVIN : directeur de recherche au C.N.R.S.
- Marie-Claire CAUVIN : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur de la mission de Cafer Höyük et de préhistoire anatolienne du ministère des affaires étrangères
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