NERVEUX (SYSTÈME) Neurogenèse et évolution
L' évolution phylogénétique du système nerveux des métazoaires, évolution si remarquable par la croissante complexité d'organisation et de fonctionnement qui la caractérise, offre au naturaliste un champ d'étude à l'intérêt fascinant. Cependant, malgré l'emploi de techniques d'examen et d'expérimentation raffinées, faisant appel aux méthodes physico-chimiques, voire informatiques et statistiques, les plus évoluées, le nombre et l'importance des questions posées et non résolues restent sans commune mesure avec les réponses que nous pouvons apporter. Le chercheur ou même seulement l'esprit éclairé doivent y trouver à la fois une leçon d'humilité intellectuelle et un aliment particulièrement stimulant pour leur curiosité.
On peut, sans grand risque d'être accusé de simplification abusive, admettre que la notion d'un perfectionnement progressif des organismes, notion évidente lorsqu'on observe l'évolution globale du règne animal, se manifeste de façon particulièrement spectaculaire dans celle du système nerveux, et cela davantage que pour tout autre système ou appareil. Nous nous efforcerons dans le cours de cet article de dégager les principes qui semblent gouverner l'évolution phylogénétique du système nerveux tant du point de vue anatomique que du point de vue fonctionnel. Cependant, avant d'en aborder l'exposition, quelques remarques générales d'introduction sont nécessaires concernant, d'une part, la phylogenèse et, d'autre part, le rôle de ce système.
Dans les traités de zoologie, les différents embranchements du règne animal sont étudiés suivant un plan apparemment logique qui conduit le lecteur de l'organisme le plus simple au plus perfectionné. Chez les invertébrés, il est habituel de décrire les cœlentérés avant les mollusques ou les arthropodes et, chez les vertébrés, les poissons avant les mammifères. Une connaissance superficielle de l'évolution des espèces tendrait à faire croire que cet ordre d'exposition signifie aussi un ordre de succession dans le temps, dans le sens où l'on pourrait imaginer qu'un poisson cartilagineux actuel est largement représentatif d'une forme considérée comme ancêtre des reptiles ou des mammifères. De même, au sein de ces derniers, il serait tentant de considérer les différents groupes comme les barreaux d'une échelle dont le plus bas serait représenté par les marsupiaux et le plus élevé par les primates ; insectivores, rongeurs, ruminants, carnivores figureraient alors les échelons intermédiaires. Ce ne serait là qu'une vue simpliste et finalement erronée, car elle ignorerait les données fournies par la paléontologie. Celle-ci nous apprend en effet qu'en aucun cas un chondrichtyen actuel ne peut être considéré comme l'ancêtre d'un reptile, non plus qu'un carnivore actuel comme celui d'un primate. Chondrichtyens, reptiles, carnivores, primates dérivent en réalité d'ancêtres communs situés beaucoup plus bas dans l'échelle phylogénétique et beaucoup plus éloignés dans le temps. Nos modernes requins, lézards, chats ou macaques sont les ultimes représentants de longues lignées dont les étapes intermédiaires ont laissé des traces fossilisées de leur squelette, parfois de leurs téguments, bien rarement de quelques structures internes. Un exemple peut illustrer ce propos : les chondrichtyens actuels ne sont pas les ancêtres de nos téléostéens, mais le terme d'une lignée qui dès le début de l'ère primaire s'est séparée de la lignée destinée à fournir les poissons osseux. De même les lézards et crocodiles d'aujourd'hui ne sauraient être considérés comme les ancêtres ou les représentants des ancêtres des mammifères, et dès le Carbonifère, à partir du tronc commun des[...]
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Écrit par
- Paul LAGET : professeur de psychophysiologie à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie
Classification
Médias
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