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NEUMATIQUE, musique

Dans l'écriture de la musique, la notation a connu notamment les accents, dérivés des accents grammaticaux, les points superposés et une combinaison des deux. Les scribes du Moyen Âge utilisèrent des signes (en grec : neuma) pour fixer le chant liturgique de l'Église romaine. On rencontre ailleurs (Inde, Tibet, Japon) des signes analogues. Une espèce primitive de neumes vint d'Orient (Arménie, Géorgie, Syrie, Éthiopie, Byzance) pour aboutir à l'abbaye de Saint-Gall, à Ravenne, à Milan et en Espagne. On rencontre ces signes pour la première fois dans des manuscrits du viiie siècle. Même s'ils sont devenus diastématiques, c'est-à-dire disposés à des hauteurs variables (diastemata : intervalles), on ne peut déchiffrer avec une certitude absolue les neumes sans lignes. Les chantres connaissaient déjà la mélodie ; l'écriture neumatique primitive consistait seulement en un procédé mnémotechnique. Guido d'Arezzo (xie s.) fut à l'origine de la portée. Grâce à cette invention capitale, l'écriture neumatique put déterminer avec précision la hauteur de chaque note. Ce ne fut pas cependant sans une longue évolution.

À l'époque de Hucbald de Saint-Amand (840 env.-930), les manuscrits portent des textes où chaque syllabe est surmontée d'un ou de plusieurs neumes alignés horizontalement. La graphie, si élémentaire soit-elle, est cependant précieuse ; ainsi, pour indiquer une montée telle que do-ré-mi, le scribe traçait un trait montant de gauche à droite (la virga, venant de l'accent aigu), dans le prolongement duquel il plaçait un point (punctum), indiquant par là que la voix devait s'élever encore une fois. Avec l'emploi des lignes, on gagna en précision. Déjà en 986, en Italie, on signale l'existence de trois lignes ; en 1025, Guido d'Arezzo en parle comme d'un procédé ordinaire. Avec la généralisation des lignes de la portée, le point devint prépondérant dans le graphisme. Trois points, par exemple, rattachés entre eux par une ligature, signifiaient qu'un mélisme de trois notes était affecté à la même syllabe. Le point finit par devenir une sorte de trace carrée, d'où le nom de notation carrée, qui apparaît au cours du xiie siècle et s'est prolongée jusqu'à maintenant dans l'écriture du plain-chant (dont la portée n'a jamais dépassé les quatre lignes).

Quelle que soit la valeur de la théorie solesmienne quant à l'interprétation rythmique des neumes, d'une part il est certain qu'elle a le mérite d'exister et d'offrir une méthode pratique fort utilisable ; d'autre part, il est non moins certain qu'on n'a jamais chanté tout ce qui est contenu dans le corpus du plain-chant actuellement officiel de l'Église romaine en suivant ces hypothèses de notre époque.

— Pierre-Paul LACAS

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Écrit par

  • : psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne, musicologue, président de l'Association française de défense de l'orgue ancien

Classification

Autres références

  • NOTATION MUSICALE

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    • 14 médias
    Les neumes constituent une sorte de sténographie musicale dérivée de la chironomie : la virga (virgule) indique que le son monte, le punctum (point) que le son descend. Pour compléter ces deux signes, dont on devine les limites (intervalles et rythme ne sont pas précisés...), la ligature va permettre...