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NÉVROSE (histoire du concept)

Extension et limites du concept de névrose

Les formations réactionnelles ne se transforment pas obligatoirement en symptômes névrotiques, mais peuvent constituer des traits de caractère, c'est-à-dire des modes de réaction habituels au sujet, qu'il s'agisse de processus mentaux ou de formes d'action. Ces traits de caractère ont la même fonction antidépressive que les symptômes névrotiques. Ils sont généralement bien acceptés par le sujet, d'où le qualificatif d'« égosyntoniques » qui leur est appliqué. S'ils permettent des relations équilibrées avec autrui, s'ils sont compatibles avec la réussite des entreprises du sujet, ils ne posent pas de problème : il suffit de signaler qu'il n'y a pas de différence de nature entre le fonctionnement mental de ces sujets « normaux » et celui des névrosés, mais beaucoup plus une différence d'ordre quantitatif.

Il peut cependant advenir que ces traits de caractère aient des effets moins heureux, entraînant des conflits avec les proches, des échecs dans la vie sociale, et que le sujet s'aperçoive alors que son comportement fâcheux tend à se répéter, malgré une certaine lucidité engendrée par les difficultés avec lesquelles il est confronté. En dépit de l'absence de symptômes névrotiques classiques, il devient alors légitime de considérer ce sujet comme atteint de névrose, d'autant plus que l'effet de la répétition de la névrose infantile est aussi important que lorsqu'il s'agit de névroses symptomatiques. C'est à propos de tels cas qu'on emploie les expressions de névrose de caractère ou de névrose de destinée.

Il existe cependant des degrés divers dans l'organisation de ces caractères névrotiques. Chez certains, l' égosyntonie est poussée à un tel degré qu'aucune critique n'est plus possible. Dans les conflits qui se développent avec l'entourage, ces sujets sont toujours convaincus d'être dans le vrai. Une telle altération de la perception du réel entraîne parfois un désordre familial global, dont les enfants sont souvent les premières victimes. Aussi a-t-on souvent comparé ces structures mentales aux psychoses.

Il ne faut donc pas étendre le concept de névrose au-delà de certaines limites. Nombre de troubles du comportement, caractérisés par l'incapacité de médiatiser le désir, de supporter les frustrations, par des réactions immédiatement « agies », sans qu'une élaboration mentale suffisante puisse intervenir, ne doivent pas être considérés comme témoignant d'une structure névrotique. Pour des raisons assez comparables, de nombreux malades atteints d'affections psychosomatiques ne peuvent être assimilés aux névrosés. Cette distinction est importante, puisqu'elle implique des attitudes thérapeutiques très différentes pour les uns et pour les autres. Enfin, les états d'angoisse aiguë ainsi que la névrose d'angoisse sont caractérisés par la faillite, sous divers effets, des processus défensifs habituels. Ils doivent donc être distingués des organisations névrotiques.

— René DIATKINE

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