NEW AGE
De nouveaux modes de vie
La resacralisation de la nature entraîne des soucis écologiques qui favorisent aussi bien l'observation individuelle d'une hygiène de vie rigoureuse que des expériences de communauté menant une vie « saine ». Le centre de Findhorn, en Écosse, est l'un des hauts lieux du nouvel âge : on peut y vivre des expériences qui sont en accord avec les principes du mouvement. De plus, les pionniers qui l'ont investie, dès 1975, ont réussi à rendre fertile une terre désolée en l'aimant et en la respectant. Une attitude qui, au-delà de tout folklore, évoque celle des romantiques du xixe siècle : pour les Allemands, Goethe et notamment Novalis, la nature est cette zone d'ombre qu'il convient d'explorer pour y retrouver le mystère de l'homme. Autre écrivain allemand, héritier des romantiques et phare éphémère de la Beat Generation, Hermann Hesse, du Loup des steppes à Siddartha, développa ces thèmes en les mariant à l'orientalisme et à l'introspection. Si bien des filiations (rarement revendiquées) peuvent être esquissées, l'éducation, au sein du nouvel âge, n'est pas la simple transmission d'un savoir tronçonné en matières distinctes et non reliées entre elles. Il faut s'attacher à connaître, il importe d'« apprendre à apprendre » en retournant aux sources de l'expérience.
De ce rapide survol des principes de base du nouvel âge découlent un nombre impressionnant de pratiques. L'éclectisme de ce mouvement y fait cohabiter charlatans et convaincus, marchands du temple et individus en quête de sagesse. Certains côtés spectaculaires n'ont pas échappé à la publicité, qui s'est empressée d'accorder le label New Age à quelques produits. Témoin la publicité pour les Gauloises blondes présentant « les fils de la terre » avançant, dans un décor de désert, habillés de blanc, grimés comme des Indiens et des lances à la main. Lorsque Yoplait lance un nouveau yoghourt Ofilus, c'est avec une affiche présentant une femme en posture de yoga, mains jointes et yeux fermés, avec un slogan : « la source du bien ». Carrefour « positive », tandis que les eaux minérales vantent leur pureté à grand renfort de lents mouvements de gymnastique chinoise. Le nouvel âge est bel et bien devenu une mode. Du sommier à placer dans le sens des ondes positives jusqu'aux différents cultes du corps et de la nature, il a envahi notre vie quotidienne et, bien sûr, possède aussi ses stars et ses hérauts : en France, Paco Rabanne évoque dans Trajectoires, son autobiographie, sa connaissance des sciences occultes et les multiples réincarnations qui l'ont conduit de la cour d'Akhenaton aux salons de couture parisiens. Aux États-Unis, l'actrice Shirley MacLaine raconte, dans L'Amour foudre, ses expériences de décorporation, de visualisation et sa connaissance des énergies.
Plus pratiques, certains sportifs de haut niveau, comme Surya Bonaly, la patineuse française malchanceuse aux Jeux d'Albertville, ne dédaignent pas les apports de la méditation, des « bonnes vibrations » et du ying et du yang avant une compétition. Tout aussi pratiques, et un peu moins désintéressées, de grandes entreprises ont compris l'apport de motivation que pouvait apporter dans le monde du travail certaines pratiques du nouvel âge. C'est ainsi que, après les stages où l'on apprend à dominer son corps et à marcher sur des braises, des cadres se retrouvent pour pratiquer le rebirth, mimer des psychodrames ou découvrir la bioénergie.
Cette atomisation du nouvel âge, jointe à l'absence de contrôle sur la valeur des groupes qui le revendiquent, conduit aujourd'hui de nombreuses personnes à être new age, tout comme monsieur Jourdain faisait de la prose : sans le savoir.
Clients des boutiques d'alimentation « bio[...]
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Écrit par
- Thierry KUBLER : journaliste, écrivain
Classification
Média