NEW DEAL
Historiens et économistes ont beaucoup discuté sur le sens et la portée du New Deal. Aux États-Unis, pays consacré au capitalisme libéral, l'intervention de l'État fédéral dans la vie économique n'était sans doute pas une nouveauté, mais jamais encore cette intervention n'avait été aussi massive, aussi continue, aussi efficace à bien des égards. Surtout, elle n'avait jamais autant affecté le domaine social et la vie individuelle des Américains. Une analyse plus poussée révèle cependant qu'aucun des remèdes adoptés par Roosevelt ne peut passer pour révolutionnaire. Certains ont voulu voir dans l'expérience du New Deal une manifestation des idées keynésiennes. Tout au plus peut-on parler d'une concomitance, non d'une influence. Car si Roosevelt eut l'occasion de rencontrer John Maynard Keynes, il déclara ne rien comprendre à ses théories, et le grand ouvrage de l'économiste anglais parut en 1935, trop tard pour influencer le cours des choses. Plusieurs des collaborateurs de Roosevelt connaissaient bien mieux Keynes, mais ils conseillèrent fort mal le président en 1937, en le laissant présenter un budget en équilibre grâce à des suppressions massives de crédits indispensables à la relance de l'économie.
On peut d'ailleurs mettre en doute l'efficacité du New Deal en tant que remède économique. En 1938, les États-Unis atteignent tout juste leur niveau de production d'avant la crise, mais leur revenu national reste encore en deçà, et le chômage est loin d'être résorbé. Le seul pays avec lequel puisse être comparée la modicité de ces résultats est la France.
Cependant, le New Deal a servi d'exemple dans plusieurs pays. La politique consistant à lutter contre la crise par une augmentation des prix et des salaires, au lieu de recourir à la traditionnelle déflation, inspira le Front populaire après son succès électoral de 1936. Mais, comme aux États-Unis, il se heurta à l'incompréhension des milieux d'affaires qui considéraient cette expérience comme une préface à un régime socialiste, alors qu'elle prétendait seulement sauver le régime capitaliste.
Le « brain trust » et la crise
On désigne par l'expression « New Deal » l'expérience tentée par le président Franklin D. Roosevelt pour mettre fin à la crise économique que traversaient les États-Unis depuis 1929. Bien que l'expérience proprement dite puisse être considérée comme terminée en 1938, par extension l'expression est couramment employée pour couvrir toute la période qui va de l'arrivée au pouvoir de Roosevelt (mars 1933) à l'entrée en guerre des États-Unis (déc. 1941). Les deux mots new deal apparaissent pour la première fois dans le discours de Roosevelt devant la convention de Chicago qui venait de le désigner comme candidat du Parti démocrate à la présidence, le 2 juillet 1932, sans aucune déclaration d'intention de sa part. La presse s'en empara aussitôt pour désigner un programme, qui n'existait pas, à l'image d'autres expressions utilisées pour les prédécesseurs de Roosevelt, le Square Deal de Theodore Roosevelt ou le New Freedom de Woodrow Wilson. Le véritable « inventeur » du New Deal fut un des membres du brain trust, Raymond Moley.
Au moment où, en novembre 1932, les électeurs américains sont appelés à élire un nouveau président, une nouvelle Chambre des représentants et à renouveler un tiers des sénateurs, le pays est plongé depuis trois ans dans une crise économique sans précédent, sur la nature de laquelle les contemporains comme les économistes actuels n'ont cessé de discuter. Le 24 octobre 1929, le « jeudi noir », le marché financier s'effondrait dans les bourses de New York, avec treize millions d'actions vendues. Un mouvement général de baisse se déclenchait, portant,[...]
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Écrit par
- Claude FOHLEN : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris
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Médias
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