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Des perspectives préoccupantes pour l’astronomie

Avant même d’en arriver au scénario catastrophe du déclenchement du syndrome de Kessler, la présence de dizaines de milliers de satellites en orbite basse est source de dégradation des observations astronomiques depuis le sol.

Pollution lumineuse de satellites - crédits : A. H. Abolfath/NOIRLab/NSF/AURA ; CC-BY 4.0

Pollution lumineuse de satellites

Dans le domaine optique, les satellites réfléchissent la lumière solaire et deviennent ainsi des sources brillantes près du coucher et du lever du Soleil, en début et en fin de nuit. Les traces brillantes produites détériorent les données des observatoires les plus modernes. Les instruments à grand champ de vue sont le plus souvent affectés par les traces lumineuses laissées par les satellites sur les images. Des simulations de l’impact des constellations de satellites pour le Very Large Telescope (VLT) de l’Observatoire européen austral (ESO pour European Southern Observator) à Cerro Paranal (nord du Chili) ont été effectuées en prenant en compte 48 000 satellites Starlink et OneWeb. Elles donnent environ 150 satellites illuminés à chaque instant à 30° au moins au-dessus de l’horizon alors que le Soleil est déjà à 18° sous l’horizon, c’est-à-dire à la fin du crépuscule astronomique. Il faut attendre deux heures après le crépuscule astronomique pour que ce nombre ne devienne nul, ce qui veut dire qu’il n’y a qu’un maximum d’un peu plus de cinq heures par nuit à l’équinoxe au cours desquelles aucun satellite n’est visible. Le nombre de satellites visibles à l’œil nu est encore de l’ordre de la quarantaine à la fin du crépuscule astronomique. L’observatoire Vera Rubin (VRO) prévoit ainsi que 30 % de ses données seront affectées et en partie perdues sur la base de simulations de la seule constellation Starlink avec 42 000 satellites, fraction comparable à celle du pourcentage de temps de mauvaises conditions météorologiques. La détection d’événements astronomiques transitoires est l’un des objectifs majeurs du VRO, et une partie serait donc perdue en présence de pollution des images par des traces de satellites. D’autres observatoires seront également affectés. Cette contamination des images serait bien pire en cas de déclenchement du syndrome de Kessler, car les débris produits généreraient un fond lumineux qui pourrait être rédhibitoire pour l’observation. Citons enfin le cas du satellite BlueWalker-3, lancé en 2022, ses 64 mètres carrés d’antenne en font la sixième source la plus brillante du ciel avec un éclat égal à celui de l’étoile Procyon, exemple dont on espère qu’il restera anecdotique.

La radioastronomie est aussi affectée par les constellations de satellites. Ce n’est pas dans ce cas la lumière du Soleil réfléchie par les satellites qui pose un souci, mais leur émission radio, et cela indépendamment de l’heure du jour ou de la nuit. On peut aisément se représenter le problème en le transposant au domaine visible et en remplaçant les émissions radio par celles de lasers qui illumineraient des télescopes depuis l’espace. Les observatoires radio sont préférentiellement construits dans des zones protégées des émissions des télécommunications terrestres pour préserver la qualité des données astronomiques. La présence de satellites de télécommunications au-dessus des observatoires signifie tout simplement la fin de ces sanctuaires. C’est le cas du grand observatoire Square Kilometer Array (SKA), en construction dans les déserts du Karoo en Afrique du Sud et de Murchison en Australie, qui sera à l’abri des télécommunications au sol, mais pas de celles venant de l’espace. Il a ainsi été estimé pour SKA que la probabilité qu’un satellite se trouve dans un faisceau de 1° à proximité d’une source pendant une observation atteint 6 % dans certaines zones du ciel pour la seule constellation Starlink, ce chiffre allant en augmentant avec la multiplication des constellations et du nombre de leurs satellites. Les interféromètres[...]

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Écrit par

  • : astronome à l'Observatoire de Paris, membre de l'Académie des sciences

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