NIBELUNGEN
« L'Anneau du Nibelung »
La première exécution de l'intégralité de la tétralogie wagnérienne, L'Anneau du Nibelung (Der Ring des Nibelungen), a lieu en août 1876 lors du premier festival de Bayreuth : Hans Richter y dirige trois cycles complets, créant Siegfried et Le Crépuscule des dieux (L'Or du Rhin et La Walkyrie avaient été créés en 1869 et en 1870, respectivement, au Königliches Hof- und Nationaltheater de Munich, sous la direction de Franz Wüllner). Wagner y travaillait depuis 1848. Les points de départ en sont, naturellement, l'Eddapoétique et l'Edda en prose de Snorri Sturluson, la Völsunga Saga, La Chanson des Nibelungen du xiiie siècle, la Thidrekssaga, avec d'importantes modifications, non seulement dans l'intrigue mais dans l'idée générale, et, pour cette dernière, dans deux directions successives. Au début de son travail (inauguré en 1848 par un essai sur les Nibelungen – Der Nibelungensage – et une esquisse dramatique sur le mythe des Nibelungen – Der Nibelungen-Mythus : als Entwurf zu einem Drama), Wagner adhérait encore au romantisme révolutionnaire et à l'optimisme de Feuerbach : le héros est celui qui rend caduque la loi et proclame la libération de l'humanité. Dans les années suivantes, l'influence croissante de Schopenhauer modifie ce point de vue : Wagner admet l'affaiblissement du vouloir-vivre (effacement progressif de Wotan et même de Siegfried) et la décadence d'un monde rongé par la cupidité.
Le prologue, L'Or du Rhin (Das Rheingold), commence par le rapt du trésor, confié à la garde des ondines du Rhin, par le Nibelung nain Alberich. Ce prologue est dominé par la figure de Wotan, qui fait construire par les géants Fasolt et Fafner la forteresse du Walhalla, siège futur de sa tyrannie. Ne voulant pas leur donner en récompense sa sœur Freia, déesse de la jeunesse et de l'amour, il leur remettra de l'or. Grâce à une ruse de Loge, le dieu du feu, il fait prisonnier Alberich et se fait livrer par lui, outre l'or du Rhin, le heaume magique qui rend invisible et l'anneau magique de la puissance qu'Alberich a fait forger par son frère Mime avec une partie de cet or : faute irréparable, violation des traités que Wotan lui-même a donnés à l'univers. Tenté de garder pour lui au moins l'anneau, Wotan ne se résigne à s'en séparer que sur l'ordre d'Erda, l'esprit du monde ; en échange de Freia, il remet tout le trésor aux géants, qui se battent dès qu'ils sont en possession de l'anneau ; Fasolt est tué, Fafner s'éloigne avec son butin, tandis que Wotan consacre la demeure des dieux, où il accueillera les plus vaillants guerriers morts au combat.
La Walkyrie (Die Walküre) se déroule quelques milliers d'années plus tard, chez les Wälsungen. Siegmund, fils humain de Wotan, y retrouve sa sœur, Sieglinde, mariée à Hunding, et s'enfuit avec elle, après s'être emparé de Notung, l'épée de Wotan. Sur les injonctions de sa femme, Fricka, Wotan, qui comptait sur ce fils pour reprendre possession de l'or, se résout pourtant à le laisser périr. Malgré l'aide de la Walkyrie Brünnhilde, émue par l'amour (incestueux) du frère et de la sœur, Siegmund périt, moins sous les coups de Hunding que sous ceux de Wotan, qui brise Notung de sa lance. Brünnhilde, fille préférée de Wotan et incarnation de sa volonté, s'est révoltée en vain ; elle va retrouver ses compagnes, les autres Walkyries, et met à l'abri Sieglinde ; mais, par sa désobéissance, elle a encouru la colère de Wotan. Ce dernier l'endort et la condamne à être soumise au premier homme qui la trouvera ; mais il l'a fait entourer par Loge d'un cercle de flammes : il faudra du moins un héros pour franchir ce cercle et devenir son maître.
Siegfried célèbre[...]
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Écrit par
- Pierre SERVANT : agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Lille-III
- Georges ZINK : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur honoraire à l'université de Paris-Sorbonne
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Médias
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