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NICOLAS DE STAËL (exposition)

On le connaît bien, ce portrait photographique du peintre français Nicolas de Staël réalisé par Denise Colomb en 1954 dans son atelier de la rue Gauguet à Paris. L’artiste y apparaît légèrement dégingandé, le corps désarticulé, svelte, sobrement vêtu de sombre, le visage aquilin et le regard un peu absent. Ce cliché a contribué à forger une légende. Bien que les commissaires de cette rétrospective, Charlotte Barat-Mabille et Pierre Wat, ambitionnent de recentrer le propos sur le travail du peintre dans la rétrospective qu’ils lui consacrent au musée d’Art moderne de Paris, du 15 septembre 2023 au 21 janvier 2024, puis à la Fondation de l’Hermitage, à Lausanne, du 9 février au 9 juin 2024. Il reste en effet difficile de séparer véritablement l’œuvre de la biographie, notamment de l’issue fatale, avec le suicide de l’artiste à Antibes, le 16 mars 1955.

Le chemin vers la peinture

La vie de Nicolas de Staël est marquée par les soubresauts du xxe siècle. Il naît en 1914 en Russie et perd très vite ses deux parents contraints dès 1919 à l’exil par la Révolution russe. Il est alors envoyé à Bruxelles dans une famille qui accueille les réfugiés. Il grandit dans le « plat pays », y fait ses études et, en 1933, entre à l’Académie royale des beaux-arts de Bruxelles. S’ensuivent plusieurs voyages de formation, notamment dans le sud de la France, en Espagne ou au Maroc, où il rencontre une autre artiste, Jeannine Guillou, dont il aura une fille, Anne. Ils s’installent à Paris en 1943. Jeannine décède en 1946, puis Staël épouse très vite Françoise Chapouton, avant d’entamer une liaison passionnelle avec Jeanne Polge peu avant sa mort. Toute sa vie, Staël, orphelin, aura connu l’exil et n’aura de cesse de courir après le temps nécessaire pour peindre, voyageant sans cesse pour préparer ses expositions, visiter des musées ou des sites antiques, notamment en Sicile.

Albert Camus songeait-il à Staël lorsqu’il rédigea sa nouvelle « Jonas ou l’artiste au travail » (L’Exil et le royaume, 1957) ? On ne peut pas ne pas penser à l’artiste devant ce peintre en proie aux angoisses existentielles, en quête d’espace et de temps disponibles. Camus écrivit à René Char : « Le suicide de Staël m’a empli en même temps de pitié et de colère. » Avant de conclure : « Mais il en a fini, et il n’était pas mon ami, et vous l’êtes. »

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