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BOUKHARINE NICOLAS IVANOVITCH (1888-1938)

Le plus jeune des six principaux dirigeants bolcheviques mentionnés par Lénine dans son « Testament », Boukharine « n'est pas seulement un théoricien des plus marquants et de très haute valeur ; il jouit à bon droit de l'affection du parti tout entier. Cependant, ses vues théoriques ne peuvent qu'avec la plus grande réserve être tenues pour parfaitement marxistes, car il y a en lui quelque chose de scolastique : il n'a jamais étudié et, je le présume, n'a jamais compris entièrement la dialectique ».

Personnalité complexe, Boukharine est beaucoup plus un intellectuel qu'un homme politique, bien qu'il se soit plongé dans l'action. Il vit avant tout dans le jeu des idées qu'il poursuit avec une logique serrée jusqu'à se détacher parfois de la réalité. Enjoué, sentimental, il est prompt à s'attacher à des personnes qu'il suit avec passion ; il en résultera chez lui de grands sauts politiques : de 1917 à 1922, pendant la montée de la révolution, il est, dans le Parti bolchevique, le leader d'une tendance de gauche qui cherche à brûler les étapes ; à partir de 1924, dans le reflux de la révolution, il est le leader et le théoricien de la tendance de droite du même parti. Il a, plus que quiconque, involontairement contribué à assurer la victoire de Staline, avant d'en devenir la victime.

La théorie de l'impérialisme

Fils d'enseignants moscovites, étudiant brillant, Nicolas Ivanovitch Boukharine rejoint le Parti ouvrier social-démocrate russe en 1906. À la suite de plusieurs arrestations par la police tsariste, il s'exile en 1911. Il rencontre Lénine à Cracovie en 1912. Au cours de la Première Guerre mondiale, il séjourne dans plusieurs pays et gagne les États-Unis en 1916. Quelques mois après, il rencontre Trotski, expulsé de France. Il retourne en Russie après la révolution de Février, est élu membre du comité central du Parti bolchevique en août 1917 et le restera jusqu'en 1929.

Économiste de formation, il consacre son premier ouvrage théorique, L'Économie politique du rentier, écrit à l'âge de vingt-cinq ans, à une critique très pénétrante de la théorie marginaliste de la valeur ; on y décèle déjà deux grandes caractéristiques de Boukharine : l'érudition, la capacité de poursuivre la logique du raisonnement avec force et minutie. La guerre mondiale lui fait aborder la question de l'impérialisme ; dans son livre L'Économie mondiale et l'impérialisme, écrit en 1915, et chaudement approuvé par Lénine, il s'inspire du célèbre ouvrage de Hilferding, Le Capital financier, et met l'accent sur la tendance à l'internationalisation du capital qui brise les cadres nationaux de l'économie.

De ses thèses économiques, Boukharine fait découler une opposition absolue, une hostilité totale à la nation qu'il considère comme une forme politique surannée et, par conséquent, réactionnaire. Il polémique sur ce point en 1915 avec Lénine qui, à la même époque, soulignait la différence entre nation impérialiste et nation opprimée et, par suite, insistait sur l'importance pour la révolution socialiste de la lutte des nations opprimées pour leur indépendance.

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Écrit par

  • : directeur de la revue Quatrième Internationale

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