OFFENSTADT NICOLAS (1967- )
L’historien Nicolas Offenstadt, connu pour ses travaux sur les pratiques de la guerre et de la paix, est né à Suresnes en 1967. Il commence ses études supérieures à l’Institut d’études politiques de Paris et étudie en parallèle l’histoire à Paris I, dont il obtient la licence en 1990. Reçu à l’agrégation en 1992, il devient pensionnaire de la Fondation Thiers.
Guerre, paix et pacifisme
Nicolas Offenstadt travaille d’abord sur l’entre-deux-guerres et les questions de guerre, de paix et de pacifisme. Dans ses premières publications, il montre que la question de la paix est utilisée par divers groupes cherchant à démontrer dans l’espace public leur capacité et légitimité à en parler : un thème qu’il développera plus tard, celui de la paix comme ressource discursive. En 2001, il soutient à Paris I une thèse dirigée par Claude Gauvard, dont les travaux s’appuient sur les méthodes de l'anthropologie et la sociologie. Publiée en 2007 (Faire la paix au Moyen Âge), elle porte sur les discours et gestes de paix pendant la guerre de Cent Ans. L’attachement à l’interdisciplinarité est essentiel dans ses travaux. Offenstadt se définit parfois comme socio-historien, car cette démarche serait celle où le social est toujours central, explicatif. La pratique de l’interdisciplinarité est sensible dans ses réflexions sur le concept de rituel. Dans Les Fusillés de la Grande Guerre (1999) est décrite la violence du rite de l’exécution qui, motivé par une pédagogie de l’exemple, se fait en présence des soldats et réussit à imposer un ordre apparent. Pour le Moyen Âge, il établit l’existence d’une « grammaire rituelle » de la paix, en centrant son regard sur la fin de la négociation entre les grands et la diffusion de l’accord de paix. Il reconstitue les répertoires de paroles, gestes, et objets de paix, et les règles de leur usage. Dotés d’une compétence liturgique, loin d’être juste manipulés, les acteurs sont placés au cœur de l’analyse.
Devenu maître de conférences en histoire du Moyen Âge à l'université de Paris I, et habilité à diriger des recherches (H.D.R.) en 2012, il continue de travailler sur la Grande Guerre et ses mémoires, et sur les pratiques politiques pendant la guerre de Cent Ans. Dans l’ouvrage issu de son mémoire d’H.D.R., En Place publique, Jean de Gascogne, crieur au XVe siècle (2013), il présente les crieurs publics comme des acteurs importants de la politique, entendue largement, la proclamation en place publique étant un moment fondamental du gouvernement. Est montré le rôle régulateur du cri devant se conformer à des normes. De façon générale, et aussi pour le xxe siècle, les cris sont érigés en objet d’histoire, loin de n’être que l’occasion d’une description folklorique.
Offenstadt est l’un des fondateurs du Collectif de recherche international et de débat sur la guerre de 1914-1918, qui a pris position dans les controverses sur l’idée de consentement patriotique. Si les soldats tenaient, ce n’était pas par patriotisme ou germanophobie. Pas parce qu’ils étaient pénétrés par une culture de guerre, comme le disent certains historiens de l’Historial de Péronne qui défendent une approche en termes d’opinion, de volonté des acteurs, rejetant largement l’idée d’une guerre subie. Les soldats ont tenu en raison d’une pluralité de facteurs. Cette thèse est notamment confortée par les témoignages des poilus – il en a édité certains, ou des correspondances, comme en 2003 (avec Rémy Cazals) « Si je reviens comme je l’espère ». Lettres du front et de l’arrière (1914-1918). Enfin, il se penche sur la mémoire contemporaine de la guerre, par exemple dans 14-18 aujourd’hui. La Grande Guerre dans la France contemporaine (2010).
Ses recherches représentent une contribution essentielle à l’histoire de l’espace public. Notamment en collaboration[...]
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Écrit par
- Paula COSSART : maître de conférences en sociologie, université de Lille, faculté des sciences économiques sociales et des territoires, Centre d'études et de recherches administratives, politiques et sociales
Classification
Média