TINBERGEN NIKOLAAS (1907-1988)
La rencontre avec Konrad Lorenz
C'est en 1936 qu'il rencontre pour la première fois Konrad Lorenz alors que ce dernier est invité à une conférence à Leyde. La notoriété de ce savant autrichien est déjà grande à cette époque. Lorenz l'invite alors, avec sa famille, à séjourner et à travailler quatre mois dans sa propriété d'Altenberg, près de Vienne. Durant cette période, Tinbergen applique sa méthode des leurres au comportement de roulage de l'œuf de l'oie grise et participe à l'effort de théorisation qui conduit à la fondation de l'éthologie classique. De cette collaboration sera tiré un article capital pour la théorie de l'instinct : « Taxie et action instinctive dans le mouvement de roulage de l'œuf chez l'oie grise » (1938). L'utilisation d'œufs artificiels de forme, de couleur et de taille différentes, montre que le déclencheur agit par des caractéristiques spécifiques très rudimentaires, puisque l'oie réalise l'action instinctive avec tout objet lisse à bordure régulière. La teinte, la forme, la taille ou les dessins de la coquille ne semblent pas être pris en compte. On peut lui faire rouler des objets parallélépipédiques, avec la même norme de mouvement que s'il s'agissait d'un œuf réel. Les mécanismes de l'appétence spécifique au roulage ont été mesurés en évaluant les seuils de déclenchement de l'action, dans des conditions de privation ou de répétition de durée variable (cf. Konrad Lorenz). L'action instinctive est stéréotypée, c'est-à-dire constante dans sa forme motrice, et elle doit être considérée comme innée, en réponse au stimulus déclencheur lui-même inné et spécifique.
Sur le chemin du retour en Hollande, Tinbergen rencontre aussi Karl von Frisch, chercheur réputé et populaire, de vingt et un ans son aîné. Cette même année 1938, il se voit offrir un billet d'avion pour les États-Unis afin d'y donner une série de conférences. Tinbergen y rencontre des personnalités comme Ernst Mayr, le théoricien de l'évolution, Frank Ambrose Beach, neurobiologiste, Théodore Christian Schneirla, et Robert Mearns Yerkes, psychologues de l'animal. Schneirla deviendra, après la Seconde Guerre mondiale, la principale cible de Lorenz outre-Atlantique et le principal opposant à la théorie objectiviste de l'instinct.
En 1939, Tinbergen publie, conjointement avec Donald Johan Kuenen, un autre article de référence sur les stimuli déclencheurs et directeurs de l'ouverture du bec chez les oisillons de merles et de grives. Paraîtront ensuite, l'année suivante, un travail sur les activités substitutives, actes sans utilité apparente et « hors propos » qui ont pour fonction de réduire le stress en situation de conflit, et, en 1942, un important article théorique sur l'étude objective du comportement inné des animaux dans lequel il continue à formaliser la théorie.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Raymond CAMPAN : professeur honoraire à l'université Paul-Sabatier, Toulouse
Classification
Média
Autres références
-
COMPORTEMENT ANIMAL - Fondements du comportement
- Écrit par Dalila BOVET
- 2 830 mots
- 5 médias
...goélands donnent des coups de bec sur une tache rouge située sur le bec de leurs parents, provoquant ainsi chez ces derniers la régurgitation de nourriture. Tinbergen montre, dès le début des années 1950, en présentant des leurres aux jeunes goélands, que la forme, la couleur ou la taille de la tête peuvent... -
ÉTHOLOGIE
- Écrit par Odile PETIT
- 2 528 mots
- 2 médias
...siècle pour la voir ériger en discipline sous le nom d'éthologie (on parle alors d'éthologie objectiviste) grâce à Konrad Lorenz (1903-1989) et Nikolaas Tinbergen (1907-1988). Le premier, souvent décrit comme le plus théoricien des deux, s'est rendu célèbre par ses travaux sur les canards et les... -
FONDEMENTS DE L'ÉTHOLOGIE
- Écrit par Raymond CAMPAN
- 251 mots
C'est par un débat contradictoire autour du concept d'instinct que l'éthologie – étude comparative du comportement animal – s'est constituée en science autonome. Elle est fondée sur les travaux de l'Autrichien Konrad Lorenz (1903-1989) et du Néerlandais Nikolaas...
-
HISTOIRE DE L'ÉTHOLOGIE - (repères chronologiques)
- Écrit par Raymond CAMPAN
- 976 mots
1854 Isidore Geoffroy Saint-Hilaire utilise pour la première fois le terme « éthologie » dans son sens actuel (étude comparative du comportement animal) pour désigner les descriptions des mœurs des animaux telles qu'elles ont été faites par Aristote, Buffon, Réaumur, G. Leroy ou Lamarck....
- Afficher les 8 références