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KAZANTZAKI NIKOS (1883-1957)

Les voyages et les rêves

« Dans ma vie, mes plus grands bienfaiteurs ont été les voyages et les rêves ». Infatigable, Kazantzáki se déplace continuellement dans l'espace et dans le temps. Ses En voyageant (Ταξιδεύοντας, 1937, 1957, 1958), série de volumes contenant des récits de voyages en Espagne, en Russie, au Japon, en Chine, etc. ne sont pas la partie moindre de son œuvre. Plus que divertissement, curiosité ou fuite romantique, le voyage pour Kazantzáki est l'objet d'une quête intérieure, on dirait même une sorte d'exorcisme des démons : le voyageur a toujours des questions angoissées à poser aux lieux qu'il visite. Suivi de ses phantasmes, il ne voit l'Espagne, par exemple, qu'à travers Don Quichotte ou Greco, son compatriote à qui, à la fin du voyage, il adressera sa « Lettre » autobiographique. L'univers kazantzakien est hanté par un Ulysse errant, symbole aussi bien d'une aventure personnelle que d'un sort national.

Assez tôt, Kazantzáki avait tenté de conquérir le public international par le roman (Toda-Raba, 1929). Mais ses efforts ne devaient aboutir qu'à la fin d'une vie qui s'achèvera en Allemagne près de Fribourg-en-Brisgau. Quittant la Grèce tumultueuse de l'après-guerre (où il essaya un moment, en 1945-1946, de jouer un rôle politique comme ministre) pour se fixer en 1948, à Antibes, il s'adonna à l'œuvre romanesque de sa dernière période. Alexis Zorbas (Βίος καὶ πολιτεία του̃ Ἀλέξη Ζορμπα, 1946) avait déjà fait fortune en grec et en français. Quatre autres romans feront preuve de l'attachement de l'auteur à la Crète, La Liberté ou la mort (Ὁ Καπετὰν Μιχάλης, 1953), ainsi que de son expérience mystique, Le Christ recrucifié (Ὁ Χριστὸς ξανασταυρώνεται, 1955), La Dernière Tentation (Ὁ Τελευται̃ος Πειρασμός, 1955), Le Pauvre d'Assise (Ὁ Φτωχούλης του̃ Θεου̃, 1956). Bête noire pour l'Église orthodoxe grecque, ascète chrétien pour beaucoup de ses biographes, Kazantzáki ne cesse d'être un auteur moraliste et un homme déchiré, obsédé par « la lutte incessante et impitoyable entre la chair et l'esprit ». Derrière son œuvre colossale, on distingue facilement un cri d'angoisse dans le désert.

— Panayotis MOULLAS

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Écrit par

  • : professeur de littérature néo-hellénique à l'université de Salonique

Classification

Média

Níkos Kazantzáki - crédits : Ullstein bild/ Getty Images

Níkos Kazantzáki