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NILOTIQUES

Le terme de nilotique porte clairement la marque de son origine géographique. Il désigne des populations qui habitent la vallée du Nil ou en sont originaires. En fait on ne l'a jamais utilisé que pour certains groupes situés entre le 12e parallèle nord et le lac Victoria (que traverse l'équateur) et qui, d'ouest en est, s'étendent sur une région qui déborde largement la vallée du Nil puisqu'en certains endroits elle atteint une douzaine de degrés de longitude. Mais, comme il est fréquemment arrivé dans les études africaines – voir le terme bantou, par exemple –, des glissements sont survenus du lieu à la langue, de la langue à la « race », et de celle-ci au mode de vie.

On s'est aperçu que les langues parlées par les Shilluk, les Dinka et les Nuer – les premiers groupes qui furent dits nilotiques parce qu'ils habitent réellement dans la vallée du Nil blanc – sont semblables aux langues parlées par certaines sociétés fort éloignées du Nil comme les Alur (en Ouganda et en République démocratique du Congo) et les Luo (au Kenya). Nilotique a pris un sens linguistique, désignant tous les groupes parlant des langues apparentées à celles des Shilluk, des Dinka et des Nuer.

Certains anthropologues physiques, comme H. V. Vallois, ont estimé que les peuples parlant des langues nilotiques présentaient des traits héréditaires distincts et constituaient dans la « race mélano-africaine » une « sous-race nilotique » caractérisée notamment par une taille très élevée, un corps élancé et un nez à l'« aspect beaucoup plus européen que nègre ».

Enfin, dernier glissement de sens, on a affirmé qu'une configuration de traits culturels était commune aux sociétés parlant des langues nilotiques. Les Nilotiques sont pasteurs ; quoique leur nourriture soit presque toujours bien plus dépendante de l'agriculture que de l'élevage, ils tiennent les activités pastorales en plus haute estime que les tâches paysannes. Cette valeur prédominante accordée au bétail a conduit certains Nilotiques, les Longarim, à l'étrange coutume du « taureau favori » : au moment de la puberté un garçon choisit un jeune taureau dont il s'occupe avec un soin particulier et auquel il s'identifie psychologiquement au point de partager avec son taureau la joie de la victoire et l'humiliation de la défaite, et, dans certains cas, de se suicider plutôt que de survivre à un animal aimé.

Un autre trait culturel commun aux Nilotiques est la descendance patrilinéaire. Sur elle se fondent des lignages segmentaires exogames et des clans localisés. Ces réseaux de parenté, d'une part, et les classes d'âge, d'autre part, remplissent des fonctions habituellement du ressort des réseaux politiques. Ceux-ci sont, chez les Nilotiques, relativement faibles. L'autorité des chefs politiques s'étend rarement au-delà du village, sauf lorsqu'il s'agit de royautés sacrées, telle celle des Shilluk. Les seuls personnages ayant une influence plus large sont pourvus de prérogatives rituelles : faiseurs de pluie et devins, prêtres accomplissant des sacrifices et arbitres-négociateurs dans les disputes.

Origines des Nilotiques

Ces sociétés, voisines parfois ou dispersées parmi d'autres, porteuses d'une communauté de langue et de culture ont vraisemblablement une origine commune. Linguistes et historiens, anthropologues et sociologues se sont efforcés de découvrir le foyer originel des Nilotiques et leurs itinéraires de dispersion, mais les différentes hypothèses ne s'accordent pas.

G. W. B. Huntingford distingue deux familles de langues parmi celles qui sont dites nilotiques. Dans certaines d'entre elles, il voit les vestiges d'une langue dans laquelle T et K étaient les désinences du singulier et du pluriel ; il appelle ces langues nilo-hamitiques ; il réserve le nom[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Californie à Los Angeles

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