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NOIR & BLANC. UNE ESTHÉTIQUE DE LA PHOTOGRAPHIE (ouvrage collectif)

Si le terme « noir et blanc » désigne aujourd’hui un moyen d’expression à part entière, ni cette terminologie ni à proprement parler les valeurs du noir et du blanc n’existaient aux premiers temps de la photographie. Sous la direction de Sylvie Aubenas, Héloïse Conesa, Flora Triebel, Dominique Versavel, ce n’est pas le moindre mérite du livreNoir & Blanc. Une esthétique de la photographie: Collection de la Bibliothèque nationale de France (RMN-Grand Palais et BNF Éditions, Paris, 2020) que de souligner ce paradoxe et de retracer l’histoire de ce qui, à partir d’une limite technique originelle, est devenu un choix esthétique et un genre photographique autonome. Ce livre devait accompagner une exposition au Grand Palais à partir de la fin de l'année 2020.

Orchestré par la Bibliothèque nationale de France à partir de ses collections, l’ouvrage ouvre ses pages sur les teintes bistre et sépia de la célèbre Grande Vague, Cette [Sète](1857) de Gustave Le Gray et les six épreuves d’un même portrait de Denise et Jacques, les enfants d’Émile Zola, réalisées par l’écrivain en 1898. Des bleus profonds du cyanotype aux variations bistre-chocolat, grises ou jaunes, ces images révèlent qu’en jouant sur les bains de fixage ou sur les papiers utilisés, les photographes avaient à leur disposition une large palette de tonalités. Si la photographie est alors certes monochrome, elle n’est nullement encore en noir et blanc.

Affirmer une esthétique

Celui-ci s’affirmera au gré des avancées techniques. L’introduction du gélatino-bromure d’argent pour les plaques négatives dans les années 1880 puis le développement par révélateur vont introduire, à la différence de procédés antérieurs, un noir franchement noir. La découverte des rayons X, celle des plaques hypersensibles rendant possible les effets de nuit sous éclairage électrique, ou encore les techniques de photogravure et de diffusion des images à grande échelle habituent l’œil au noir et blanc tout en donnant à celui-ci un vernis de modernité. En adoptant ces valeurs, la photographie se rapproche aussi de pratiques artistiques reconnues comme le dessin et la gravure.

Paradoxalement, cette affirmation du noir et blanc bénéficie de l’invention de la couleur, qui s’impose entre 1935 et 1980, adoptée par les médias de masse, la publicité, les magazines de mode, et ainsi associée à la frivolité, au consumérisme, voire à la vulgarité. Le noir et blanc, symbole de sobriété et de sérieux, ne restera pas longtemps un pis-aller face à cette évolution : il deviendra une prise de position, un mode d’expression engagé, un parti pris esthétique et un genre photographique en soi.

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Média

<em>Je n’ai pas de main qui me caresse le visag</em><it>e</it>, M. Giacomelli - crédits : BnF - Département des Estampes et de la photographie © Archivio Mario Giacomelli - Simone Giacomelli

Je n’ai pas de main qui me caresse le visage, M. Giacomelli