NOMADISME
Le nomadisme pastoral : les pré-Bédouins
C'est, en fait, la domestication du bétail qui a fourni pour la première fois la possibilité de réaliser, avec le nomadisme pastoral, un genre de vie mettant pleinement et régulièrement à profit les possibilités des zones arides par des déplacements saisonniers. Entre le Xe et le VIIe millénaire av. J.-C. apparaît dans le Proche-Orient l'utilisation du gros et du petit bétail d'où naîtra une première strate de genres de vie pastoraux.
Ces premiers pasteurs des steppes, ignorant encore le cheval et le chameau, et profondément différents des nomades chameliers par leur structure sociale, leurs déplacements, leur économie, peuvent être appelés pré-Bédouins. Utilisant encore fréquemment le bœuf porteur ou l'âne comme bêtes de somme, pratiquant des migrations relativement lentes et à courte distance qui ne les écartent guère des points d'eau permanents, habitant dans des huttes encore peu mobiles à l'exclusion de la tente, organisés en tribus relativement cohérentes qui ne connaissent pas les formes de chefferie belliqueuse et instable développées ultérieurement dans le monde bédouin, ces pré-Bédouins ont été par excellence, jusqu'au Ier millénaire av. J.-C.,
les occupants des zones désertiques et de leurs marges subarides dans l'Ancien Monde.
Il en subsiste aujourd'hui quelques groupes dans les milieux montagnards, restés imperméables aux nomades arabes et à leurs dromadaires des déserts chauds, au nord de la zone désertique (Kurdes et Lours du Zagros iranien, à bœufs porteurs, par exemple). Chez les Touareg, au cœur du Sahara, on les retrouve dans la couche inférieure, les tribus vassales à troupeaux de chèvres. Mais ils ont été surtout rejetés vers les parties méridionales du grand désert et les zones intertropicales par l'expansion ultérieure du grand nomadisme chamelier. C'est essentiellement dans le milieu géographique déjà plus clément des brousses sahéliennes qu'on les observe aujourd'hui, depuis l'Arabie (Qara du Dhofar) jusqu'à l'Atlantique (Baggara du Soudan, à bœufs porteurs, par exemple).
Une partie d'entre eux ont pénétré dans les zones intertropicales où se sont ainsi constituées, malgré l'hostilité d'un environnement peu propice à l' élevage, de grandes tribus nomades pastorales : Peuls d'Afrique occidentale, infiltrés en petits groupes dans toutes les savanes, du Sénégal à l'Oubangui ; tribus nilo-hamitiques de la plaine du haut Nil (Dinka, Shilluk, Nuer) ou des hauts plateaux d'Afrique orientale (Turkana, Masai, etc.). Les déplacements s'organisent en fonction des alternances pluviométriques saisonnières du milieu intertropical, avec dispersion en saison des pluies sur les plateaux herbeux, concentration en saison sèche dans les vallées et les plaines alluviales où l'inféroflux entretient les herbages.
C'est à partir d'un autre animal, le renne, qu'un genre de vie nomade pastoral s'est développé dans la zone des toundras subpolaires de l'Eurasie. Les conditions de la domestication restent obscures (sans doute au IIIe millénaire avant notre ère, soit avant la dislocation des tribus samoyèdes, chez lesquelles existe un nom unique pour le renne domestique, et après la dernière migration par le détroit de Béring, la domestication étant restée inconnue des peuples de l'Amérique du Nord), et elle s'est probablement effectuée en deux centres distincts, l'un dans la région des monts Saïan, qui a donné naissance aux élevages samoyède et lapon, un autre, plus à l'est, qui aboutit aux élevages toungouz et paléoasiate (Tchouktchi et Koriak de l'Asie du Nord-Est).
Les migrations s'organisent normalement du sud au nord, avec hivernage dans la zone de la forêt et estivage dans la zone de la toundra, conformément[...]
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Écrit par
- Xavier de PLANHOL : professeur à l'université de Paris-Sorbonne, membre de l'Academia Europaea
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Médias
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