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NRF (Nouvelle Revue française)

De toutes les revues, La Nouvelle Revue française fut certainement la plus convoitée et la plus imitée. Réussite suprême, ses seules initiales, N.R.F., sont devenues familières et suffirent longtemps à désigner une haute ambition littéraire. À la fois revue de création et revue de critique, La N.R.F. s'est d'emblée imposée comme une revue ouverte, notamment aux littératures étrangères, une revue sans dogme, réagissant au classicisme et au nationalisme littéraires de son époque et soumise à une seule exigence : être chaque mois un « lieu d'asile » pour les écrivains, ne considérer la littérature que sous l'angle de sa qualité et ne juger les auteurs qu'à l'aune de leur talent.

L'aventure avait commencé en 1909, après un faux départ l'année précédente. À l'origine, un groupe d'amis : Marcel Drouin, André Ruyters, Jean Schlumberger, Henri Ghéon, Jacques Copeau, réunis autour de celui qui allait être pendant des années au centre de la revue, son directeur de fait, même s'il se refusait à l'être en titre : André Gide. Ses adversaires ne s'y trompèrent d'ailleurs pas : La N.R.F. était bien pour eux la revue de Gide.

Jusqu'à la Première Guerre mondiale, où elle cessa de paraître, la revue connut une lente mais continuelle ascension, donnant au passage naissance à un comptoir d'édition — qui devint ensuite les éditions Gallimard —, au théâtre du Vieux-Colombier, aux Décades littéraires de Pontigny, toutes créations qui allaient jouer un rôle important dans la vie intellectuelle et littéraire de l'époque. Très vite, la revue allait s'attirer, non parfois sans polémiques et jalousies à l'encontre de ce que certains dénonçaient déjà comme la « chapelle N.R.F. », des collaborateurs fameux : Albert Thibaudet, André Suarès, Paul Claudel, Charles Péguy, Valery Larbaud, Roger Martin du Gard, Marcel Proust, Paul Valéry... Rares sont ceux qui résistèrent à ses avances. De ce fait, à la veille de la guerre, la réputation de La N.R.F. était déjà solidement établie.

La revue reparaît en 1919, cette fois sous la direction de Jacques Rivière qui l'entrouvre à de nouveaux auteurs : aux surréalistes Louis Aragon et André Breton, à Marcel Jouhandeau, François Mauriac, Paul Morand, Marcel Proust... Gide, lui, est toujours présent et actif. À partir de 1925, la revue est animée principalement par Jean Paulhan, qui en devint officiellement directeur en 1935. Durant tout cet entre-deux-guerres, tous les courants de la littérature trouvent asile dans la revue — jusqu'au « saugrenu », dira Schlumberger. Parmi les auteurs : Julien Benda, Jacques Audiberti, Jules Supervielle, Francis Ponge, Henri Michaux, Maurice Blanchot, Roger Caillois, René Daumal, Jean Grenier... Contrairement aux principes du début, dans les années 1930, l'actualité politique fait également son entrée dans la revue, principalement à travers la rubrique « L'air du mois ». Durant toute cette époque, La N.R.F. fut vraiment cette « rose des vents » de la littérature dont parla Mauriac, représentant pour l'étranger l'excellence littéraire française.

Mais l'importance de La N.R.F. ne tient pas seulement à la qualité de ses sommaires, où figuraient de grandes œuvres françaises et étrangères, mais tout autant au style même de la revue, à ce fameux « ton N.R.F. » donné principalement par les célèbres « Notes » d'actualité et de critique (dont une abondante « Revue des revues ») distribuées entre les sujets et les collaborateurs suivant une subtile alchimie éditoriale.

En juin 1940, la revue cessa d'être publiée, puis fut à nouveau autorisée à reparaître en décembre de la même année, sous la direction de Pierre Drieu La Rochelle, pour s'arrêter à nouveau en juin 1943, désertée par la plupart[...]

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Écrit par

  • : ingénieur au C.N.R.S., rédacteur en chef de La Revue des revues, administrateur de l'Institut mémoires de l'édition contemporaine

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