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O.G.M. Les risques

Les risques socio-économiques

Les plantes et les animaux sélectionnés classiquement ne sont pas brevetés. Pour les semences, le système de protection qui a été mis en place donne satisfaction depuis plusieurs décennies. S'appuyant sur un certificat d'obtention végétal (C.O.V.), il oblige les agriculteurs à payer une redevance au semencier pour exploiter une variété donnée. En retour, l'agriculteur bénéficie d'une libre disposition de cette semence. Ce système s'accommode bien de l'impossibilité qu'il y a de décrire en détails les modifications génétiques qui résultent de la sélection classique.

À l'inverse, la modification génétique d'un O.G.M. est parfaitement connue et donc en principe brevetable. Les O.G.M. alimentaires, de façon générale, ne sont pas pour autant brevetés en tant que tels dans la mesure où l'addition d'un gène, aussi intéressante soit elle, ne saurait autoriser son inventeur à s'approprier l'ensemble des gènes dont la présence et l'action résultent d'une sélection génétique réalisée par nos ancêtres pendant des millénaires. Les entreprises peuvent, en revanche, breveter les gènes et les méthodes qui ont été mis en œuvre pour obtenir des O.G.M. Le brevetage des gènes en tant que tels n'est pas admis par beaucoup de citoyens qui considèrent qu'il s'agit d'un bien commun à toute l'humanité. Un tel brevetage est en principe impossible puisque l'identification d'un gène est une découverte et non une invention. Il paraît en revanche acceptable de breveter un gène pour une utilisation biotechnologique bien définie. Cela ne doit en rien empêcher un autre inventeur de breveter le même gène pour une autre application. Le semencier protège donc l'utilisation des O.G.M. qu'il a créés par l'intermédiaire des brevets qu'il prend sur les gènes et les méthodes mises en œuvre pour les obtenir.

L' utilisation des O.G.M. engendre donc des changements dans les pratiques agricoles et commerciales. Les O.G.M. actuels sont normalement féconds et ils peuvent donc être ressemés comme les autres plantes. Pour protéger leurs inventions, les semenciers imposent aux agriculteurs de ne pas réutiliser les semences O.G.M. plus qu'un nombre de fois précisé dans un contrat. Ce système n'est pas satisfaisant pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, depuis des millénaires, l'agriculture consiste à ressemer une partie des graines qui ont été récoltées. Les agriculteurs tolèrent donc mal les restrictions imposées par le pourvoyeur d'O.G.M. Certains semenciers procèdent à des prélèvements dans des champs, à l'insu des agriculteurs, pour révéler d'éventuelles utilisations frauduleuses de leurs semences. Ces prélèvements ont été suivis de procès mal acceptés et généralement perdus par les agriculteurs n'ayant pas respecté le contrat signé avec le semencier.

Le fait que les semences d'O.G.M. soient la propriété d'un nombre très réduit de semenciers n'est pas satisfaisant non plus et fait peser la menace d'un monopole de fait des semences O.G.M. Ce monopole est bien réel. Toutefois, les pays n'étant pas sous la coupe d'un brevet susceptible de protéger un O.G.M. donné peuvent légalement cultiver l'O.G.M. non juridiquement protégé. L'Argentine est ainsi devenue un des principaux pays producteurs de soja transgénique en ressemant de multiples fois les semences de soja résistant au Roundup sans rien devoir au semencier. Il existe, par ailleurs, un marché libre des semences O.G.M. dans plusieurs continents. Les semences de soja résistant au Roundup sont ainsi passées massivement de l'Uruguay, où ces semences étaient autorisées, au Brésil, où elles ne l'étaient pas, les agriculteurs brésiliens trouvant leur intérêt à utiliser[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche, unité de biologie du développement et reproduction, Institut national de la recherche agronomique

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