O.G.M. Production et utilisation
De la sélection génétique à la transgenèse
La sélection génétique consiste à ne conserver que les organismes vivants qui ont les caractéristiques souhaitées par le sélectionneur. Une telle opération n'a de sens que parce que les caractères génétiques sont héréditaires et qu'ils peuvent varier spontanément d'une génération à l'autre.
Les mécanismes induisant ces variations, appelés mutations, ont lieu chez toutes les espèces. Il s'agit de la modification d'une base de l'ADN qui résulte soit d'une erreur de copie, lorsque l'ADN se réplique pour donner deux cellules filles, soit de l'effet mutagène d'une substance chimique ou d'un rayonnement. Chez les organismes les plus rudimentaires, des conditions de stress peuvent aussi induire une instabilité de l'ADN, ce qui met l'individu en péril mais offre plus de chances à l'espèce de s'adapter aux conditions auxquelles elle est soumise. Certaines mutations ne portent pas que sur la modification de bases de l'ADN, mais sur des remaniements plus ou moins profonds des chromosomes qui ont un impact majeur sur l'évolution des organismes vivants.
Chez les organismes ayant une reproduction sexuée (végétaux et animaux), des mécanismes plus complexes interviennent. Chaque embryon reçoit une copie des chromosomes de son père et une autre de sa mère. Cette situation résulte de l'union des cellules sexuelles (spermatozoïde et ovocyte chez les animaux) qui se produit à la fécondation. Chaque cellule sexuelle reçoit elle-même une copie de chaque chromosome provenant soit du père, soit de la mère de l'individu. À cela, il faut ajouter que les chromosomes des cellules sexuelles sont formés à partir de fragments de chromosomes homologues des cellules parentales. Chaque individu a donc fondamentalement les mêmes gènes que les autres individus de la même espèce mais chaque gène existe sous plusieurs versions légèrement différentes, que l'on nomme des allèles. Chaque individu hérite donc d'une combinaison d'allèles qui lui est propre. Ces mécanismes expliquent pourquoi chaque individu appartient sans ambiguïté à une espèce tout en étant fondamentalement unique. Le clonage qui court-circuite la reproduction sexuée donne, en revanche, naissance à des individus génétiquement identiques pour l'essentiel. Tel est également le cas des vrais jumeaux qui sont issus d'un dédoublement de l'embryon initial.
Par essence, la reproduction sexuée est une loterie puisqu'elle résulte de la recombinaison aléatoire des gènes parentaux plus ou moins spontanément mutés. Le sélectionneur se contente de repérer et de reproduire les individus les plus intéressants pour lui et qui ne sont que le fruit du hasard. Il trie les individus sur la base de leurs propriétés biologiques sans connaître les gènes qu'il privilégie de la sorte. En choisissant les caractères biologiques – en réalité les gènes qui les codent – l'expérimentateur s'expose à entraîner avec eux des gènes voisins. C'est pour cette raison que la sélection génétique engendre des géniteurs dont les propriétés sont intéressantes mais qui peuvent porter aussi des tares génétiques qui se révéleront dans la descendance.
La transgenèse procède autrement. Un des intérêts majeurs du génie génétique réside dans la possibilité d'introduire un gène isolé dans une cellule voire dans un organisme entier. Dans le premier cas, on obtient une cellule transformée et, dans le second, un organisme génétiquement modifié qui peut être une bactérie, une levure, une plante ou un animal. Le qualificatif de transgénique est plus particulièrement utilisé pour les organismes pluricellulaires, les plantes et les animaux.
La transgenèse utilisée pour modifier les organismes vivants exploités par l'homme[...]
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Écrit par
- Louis-Marie HOUDEBINE : directeur de recherche, unité de biologie du développement et reproduction, Institut national de la recherche agronomique
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