OASIS
Historiquement, c'est sans doute à propos des oasis qu'ont été formulées les premières réflexions de nature géographique. On doit à Hérodote la première description de la plus grande et de la plus célèbre des oasis, l'Égypte. Oasis est d'ailleurs un mot égyptien, qui nous est venu par l'intermédiaire des Grecs, sans grande déformation.
La violence du contraste qu'offre l'oasis, son eau et sa végétation abondantes, avec les étendues arides ou semi-arides qui l'environnent était bien faite pour attirer l'attention. Par ailleurs, dans l'Ancien Monde où les espaces désertiques ont été traversés pendant des siècles, les oasis sont des étapes qu'il était vital de bien repérer, sinon de contrôler étroitement. Aussi n'est-il pas surprenant que les premiers géographes, grecs ou arabes par exemple, au service des rois et des princes, aient fait grand cas de ces espaces relativement restreints. Au milieu du désert, les privilèges hydrauliques dont jouissent les oasis paraissent si grands que leur création fut longtemps imputée à l'action bienveillante des dieux. Le « miracle de l'eau » est l'expression qui revient dans la plupart des descriptions.
Les différentes techniques de l'eau
C'est, non sans raison, aux différentes techniques de l' eau que va l'intérêt de ceux qui procèdent à l'étude des régions arides et des oasis qui s'y trouvent. Cependant il importe de souligner, dès l'abord, que l'énumération et la localisation des différentes méthodes qui sont utilisées pour disposer, en quantité relativement considérable, de l'eau nécessaire à la culture dans les régions très chaudes et très sèches ne constituent qu'une étude extrêmement partielle des différents problèmes que posent les oasis.
Les oasis les plus vastes et les plus peuplées sont celles qui se trouvent dans les vallées des grands fleuves allogènes, qu'ils viennent de lointaines régions très arrosées (Nil) ou qu'ils descendent de hautes montagnes fortement enneigées (oasis d'Asie centrale). La crue de ces fleuves recouvre le lit majeur, et depuis des millénaires on y pratique des cultures de décrue. Les techniques mises en œuvre peuvent être très élémentaires, mais, dans la plupart des oasis, depuis longtemps, différents procédés (canaux, digues, submersibles) sont utilisés pour provoquer, compte tenu des données de la topographie, l'étalement de la crue sur les plus grandes surfaces possible et pour tenter de stocker le maximum d'eau derrière de petits barrages ou dans des casiers formés de petites digues de boue séchée. Ce sont les techniques de l'inondation dirigée.
Les oasis d'Iran et d'Afghanistan et certaines oasis maghrébines du piémont saharien captent l'eau grâce à des réseaux de galeries souterraines : foggaras d'Afrique du Nord, kharez et qanat iraniens ou afghans. Il s'agit de grands systèmes de drainage destinés à capter l'eau infiltrée dans les piémonts alluviaux et à la concentrer sur les oasis.
Pour tirer parti de la nappe phréatique, la plupart des oasis se caractérisent par la diversité des techniques de puisage ; qu'il s'agisse des puits à balancier (chadouf), des puits à poulie actionnée par un animal attelé, des puits dotés de roue d'engrenage mue par le déplacement circulaire d'une bête de trait. Le système de la roue à godets actionnée par le courant de la rivière (noria) ne se trouve qu'aux abords des fleuves relativement permanents ; en fait, la noria n'est pas typique des oasis.
Dans certaines oasis, comme celles du Souf en Algérie, l'utilisation de la nappe phréatique s'effectue non par des techniques de puisage, mais par le creusement de vastes excavations (les ghout) au fond desquelles on plante les palmiers[...]
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Écrit par
- Yves LACOSTE : docteur ès lettres, professeur à l'université de Paris-VIII-Saint Denis
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