OCCUPATION (France)
Premiers refus
« La » Résistance se construit donc dans des contextes différents, progressivement, à partir de comportements qui vont du refus radical de l'armistice, comme le général de Gaulle, à des stratégies plus ambiguës, parfois indulgentes vis-à-vis du Maréchal et de la « révolution nationale » et hostiles à de Gaulle. L'attitude la plus sinueuse est celle du Parti communiste, confiant dans Staline, mettant en sourdine son antinazisme pour dénoncer Vichy, Londres (puis Berlin) et préconiser un gouvernement populaire. Les points de départ des résistances sont variés et dépendent de la présence réelle des occupants, du poids de Vichy et des appartenances sociales, politiques et culturelles. Certains se sont engagés plus clairement que d'autres, car un fossé sépare l'opinion résistante, précocement répandue, de l'action résistante, qui constitue vraiment une transgression. Une série de gestes marquent ses débuts, le tract du démocrate-chrétien Edmond Michelet, le 17 juin, à Brive proclamant « Celui qui ne se rend pas a raison contre celui qui se rend », la tentative de suicide du préfet d'Eure-et-Loir, Jean Moulin, le même jour, pour ne pas risquer de céder aux occupants, le texte de Charles Tillon, responsable communiste du Sud-Ouest, appelant à l'action « contre le fascisme hitlérien » et « pour l'indépendance nationale », sont parmi les plus connus. Mais tous sont naturellement éclipsés par les appels que le général de Gaulle lance à la B.B.C., entre le 18 et le 26 juin, et dont l'audience est moins faible qu'il n'est généralement dit. L'écoute de Londres est une première forme de résistance, dont les effets se font tôt sentir à travers le bouche à oreille et les graffitis (croix de Lorraine, « V » en 1941). Il en est d'autres, comme la contre-propagande par tracts ou papillons, l'assistance, y compris illégale, apportée aux réfugiés, internés ou persécutés, les récupérations d'armes, ou l'aide à l'évasion des prisonniers de guerre en Z.O. Beaucoup de ceux qui veulent continuer la lutte tentent de partir de France et de gagner l'Angleterre, parfois dès juin 1940 comme les pêcheurs de l'île de Sein, le plus souvent en tentant de traverser la frontière espagnole (environ 30 000 personnes en quatre ans).
À Londres, les Britanniques donnent au général de Gaulle des moyens pour agir, sans toutefois lui accorder le statut de chef de gouvernement en exil. Ses forces sont limitées. Des colonies, comme le Tchad du gouverneur Félix Éboué, le rejoignent (26 août 1940), mais l'Afrique du Nord et l'A.O.F. restent fidèles à Vichy. Les engagements dans les Forces françaises libres (F.F.L.) ne s'élèvent qu'à 53 000 entre 1940 et juin 1943. Cependant, grâce à la radio, « Londres » devient un mythe pour les Français, qui ignorent les conflits avec les Britanniques, les dissensions entre gaullistes et antigaullistes ou des ruptures comme celle de l'amiral Muselier, chef des Forces françaises navales libres, en mars 1942. Le manifeste de Brazzaville du 27 octobre 1940 est l'acte fondateur de la France libre. Il crée le Conseil de défense de l'empire, transformé un an plus tard en Comité national français à la vocation politique mieux affirmée. Le colonel Passy (André Dewavrin), le chef de son service de renseignements (bientôt appelé Bureau central de renseignements et d'action, le B.C.R.A.), envoie en métropole des missions qui permettent d'étendre son influence. Celle d'Honoré d'Estienne d'Orves se conclut tragiquement par son exécution le 29 août 1941. Mais d'autres sont à l'origine des premiers réseaux gaullistes, comme la Confrérie Notre-Dame dirigée par le colonel Rémy.
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Écrit par
- Jean-Marie GUILLON : professeur émérite des Universités
Classification
Médias
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