OCÉANIE Ethnographie
Micronésie
Histoire du peuplement
Les documents écrits faisant défaut, l'histoire culturelle de la Micronésie doit être déduite des observations combinées des anthropologues, des archéologues et des linguistes, qui montrent d'ailleurs une assez grande cohérence. Les techniques de l'archéologie sont souvent les plus efficaces ; malheureusement, faute de fouilles systématiques suffisantes, on ne peut encore établir une chronologie sûre, particulièrement pour les archipels atolliens. On sait toutefois que, pour le peuplement de l'archipel des Mariannes, la date de 1500 avant J.-C. a été déterminée à Saipan grâce au carbone 14. Il semble donc plausible que les Carolines aient été aussi occupées vers cette époque. Il faut de plus se souvenir que, dans tout le Pacifique, les fouilles stratigraphiques modernes font nettement reculer les dates des premières occupations.
La linguistique offre un autre outil. Même avec des langues sans écriture, il est possible d'établir des origines historiques communes. Dans l'état actuel des connaissances, ce que l'on peut dire est que toutes les langues de Micronésie appartiennent à un même phylum du groupe austronésien (ou malayo-polynésien). Ce phylum se divise en familles ; les langues des Carolines forment la famille la plus diversifiée. Le linguiste américain I. Dyen y distingue le groupe de Palau, le groupe de Yap, le groupe de Truk, le groupe de Ponape (dialectes de Ponape, Ngatik, Mokil) et Kusaie, qui forme un groupe à part, peut-être apparenté aux langues nettement polynésiennes des deux atolls de Kapingamarangi et de Nukuoro. Entre ces groupes, la compréhension n'est pas possible ; par contre, les archipels des Marshall, d'un côté, et des Gilbert, de l'autre, présentent une unité linguistique presque complète.
Les anciennes méthodes des anthropologues physiques, fondées sur les mesures corporelles, sont de plus en plus abandonnées aujourd'hui, à cause de l'influence de l'environnement, et on accorde une importance croissante aux théories fondées sur l'étude des types sanguins strictement héréditaires. Une certaine similarité implique une origine commune : on s'est aperçu que le type physique des habitants de l'atoll de Kapingamarangi est semblable à celui des autres Polynésiens, ce qui corrobore la preuve linguistique. Toutefois, l'ensemble des peuples micronésiens n'est pas non plus homogène de ce point de vue, et on a tendance à rendre compte des variations en postulant des origines multiples. Philippines, Indonésie orientale, Mélanésie du Sud et même Japon ont sans doute contribué à la constitution de la population micronésienne, qui a la taille moins haute, la peau plus foncée et la chevelure moins ondulée que la population polynésienne.
Nous pouvons maintenant classer approximativement les sous-cultures de Micronésie :
– les deux atolls Kapingamarangi et Nukuoro, qui forment deux « enclaves » (outliers) de langue et de culture polynésiennes apparentées aux autres enclaves culturelles identiques que l'on trouve plus au sud en Mélanésie (Taku, Sikaiana, Tikopia, etc.) ;
– les Mariannes, qui formaient sans doute une aire à part (la culture du riz y était connue) ;
– les Carolines occidentales, qui comprennent d'une part les Palau et les îles du Sud-Ouest, d'autre part Yap et son « empire » ;
– les Carolines orientales : aire de Truk (Puluwat, Namonuito, Truk proprement dit) et aire de Ponape (Ngatik, Ponape propre, Mokil, Pingelap) ;
– Kusaie, formant une sorte de transition avec les îles Marshall ;
– enfin les Gilbert, que l'on peut subdiviser, sur des bases plus sociologiques, en Gilbert du Nord (avec Banaba) et Gilbert du Sud.
Deux points de vue s'opposent sur l'origine de ces migrations. Selon A. Sharp, qui raisonne surtout à partir de faits polynésiens, le peuplement[...]
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Écrit par
- Daniel de COPPET : directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales
- Jean-Paul LATOUCHE : attaché de recherche au C.N.R.S.
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