ŒCUMÉNISME
Le dialogue entre Genève et Rome
L'histoire des ruptures est jalonnée d'une série de tentatives pour rétablir l'unité brisée : les conciles de Lyon (1274) et de Florence (1439) avaient essayé en vain de rapprocher les Églises d'Orient et d'Occident ; les réformateurs, tant Calvin que Luther et Bucer, conscients de viser à une catholicité évangélique, souhaitent un Concile qui soit vraiment représentatif de tous et qui renouerait avec la grande tradition des conciles « œcuméniques » des cinq premiers siècles : or, le concile de Trente (1545-1563), s'il marque un retour du catholicisme à une foi et à une spiritualité authentiques, est fondamentalement antiprotestant ; au cours du xviie siècle, les divisions se cristallisent et quatre grandes « confessions » (catholique, orthodoxe, anglicane et protestante, cette dernière avec un grand nombre de dénominations) se dressent dans une rigidité croissante les unes en face des autres avec tout un arsenal de polémiques et parfois de violences qui creusent de plus en plus les fossés existants. C'est dans l'anglicanisme du xixe siècle que la préoccupation de l'unité reste la plus vivace (mouvement d'Oxford, conversations de Malines), cependant que les diverses dénominations protestantes se constituent en « alliances mondiales » (luthérienne, réformée, méthodiste, etc.). De leur côté, les mouvements de jeunesse, reprenant le souci de Melanchton, l'adjoint de Luther, entreprennent le dialogue avec les Églises orientales. Enfin, en 1910, les grandes sociétés missionnaires organisent la Conférence missionnaire d'Édimbourg, au cours de laquelle les chrétiens d'Asie et d'Afrique adjurent les vieilles Églises de renoncer à leurs divisions confessionnelles, pour apporter le même Christ aux peuples non encore évangélisés. Dès lors, un mouvement est lancé qui conduit en 1921 à la constitution d'un Conseil international des missions, en 1925 à la première conférence du « christianisme pratique » (« Vie et action »), en 1927, à Lausanne, à la première conférence sur les questions doctrinales séparant les Églises (« Foi et Constitution ») ; ces deux conférences sont suivies, en 1937, à Oxford et à Édimbourg, de deux assemblées qui en prolongent le travail à la veille de la Seconde Guerre mondiale et qui recueillent et répercutent de façon frappante le témoignage de « l'Église confessante » allemande. Ces réunions, dans lesquelles les orthodoxes prennent une part très active, décident qu'une conférence se tiendra à Utrecht, en 1938, pour jeter les bases de ce qui sera, après 1945, le Conseil œcuménique des Églises. Aux pionniers des premières années : l'archevêque N. Söderblom, luthérien suédois, l'archevêque orthodoxe Germanos de Grèce et le réformé français W. Monod, succède une nouvelle génération entraînée par le président de la Fédération protestante de France, Marc Boegner, et animée par un Hollandais d'un tempérament et d'une compétence exceptionnels, le Dr W. A. Visser 't Hooft : c'est l'Assemblée constitutive d'Amsterdam (1948), suivie des conférences générales d'Evanston (1954), de New Delhi (1961) d'Uppsala (1968), Nairobi (1975), Vancouver (1983). Sans autorité ecclésiastique ou canonique, le Conseil œcuménique, qui a son siège à Genève, est un instrument commun que les Églises séparées et souveraines se sont donné en vue du travail à accomplir. Ses décisions, qui n'ont « d'autorité que celle que leur confèrent leurs propres vérité et sagesse », ont une profonde répercussion dans la vie des Églises membres, rassemblées ainsi « en une union fraternelle d'Églises qui confessent Jésus-Christ comme Dieu et Sauveur selon les Écritures et s'efforcent de répondre ensemble à leur commune vocation pour la gloire[...]
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Écrit par
- Jean BAUBÉROT : directeur d'études émérite du groupe Sociétés, religions, laïcités au C.N.R.S.
- Georges CASALIS : docteur d'État en théologie, administrateur du musée Calvin de Noyon
- Étienne FOUILLOUX : professeur des Universités, professeur d'histoire contemporaine à l'université de Lyon-II-Louis-Lumière
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