DOLLFUS OLIVIER (1931-2005)
Né à Paris en 1931, Olivier Dollfus a incarné à sa manière la nouvelle géographie française.
Agrégé de géographie, nommé professeur à la Sorbonne en 1967, il est l'un des membres fondateurs, en 1970, de l'université de Paris-VII, au sein de laquelle il a terminé sa carrière comme professeur émérite.
Spécialiste des massifs montagneux (Andes, Himalaya et Alpes), il a notamment dirigé l'Institut français d'études andines (I.F.E.A.) à Lima (Pérou) et présidé le conseil scientifique du parc national des Écrins. Ses nombreux travaux, directions de thèses et de programmes de recherche témoignent de son intérêt pour les divers aspects de la discipline, qu'il s'agisse de géographie physique ou humaine, et de ses préoccupations pluridisciplinaires.
Après une thèse de géomorphologie (Les Andes centrales du Pérou et leurs piémonts, entre Lima et le Péréné : étude géomorphologique), 1965, il se penche très tôt sur les problèmes du développement, qu'il étudie dans sa thèse complémentaire (Le Pérou : introduction géographique à l'étude du développement, 1968). Il sera ainsi co-fondateur et président du Groupement d'intérêt scientifique pour l'étude de la mondialisation et du développement (Gemdev), créé en 1983.
En publiant L'Espace géographique(1970) et en participant au comité de rédaction de la revue universitaire, créée en 1972, qui reprend le titre de son ouvrage, il s'inscrit dans la nouvelle vague de la géographie française qui accorde une place importante à la mesure des phénomènes spatialisés. Co-auteur, avec Roger Brunet, du premier volume d'une nouvelle Géographie universelle (1990), il y développe la notion de « système-monde », ce qui témoigne d'un changement dans la méthode géographique. L'échelle mondiale, jusqu'alors étudiée seulement de manière thématique, devient le support d'un espace qui s'impose aux espaces de taille inférieure. Cependant, les relations de type systémique qui lient les différents espaces fonctionnent à double sens, entre le local où se construisent les systèmes productifs et le global qui naît de la valorisation de leurs produits tout en pilotant leur diffusion. Développant par la suite son analyse de la mondialisation, Olivier Dollfus plaide pour l'invention d'une politique adaptée à ce nouveau contexte de l'histoire de l'humanité. Son engagement le conduit à des fonctions de conseiller pour différents ministères.
Il a occupé une place particulière au sein de la nouvelle géographie française, à la fois par le maintien de son engagement dans la recherche en géographie physique, sa capacité d'intégration de l'héritage de la discipline et son rapport légèrement distancié à l'importation des concepts des sciences de la nature dans les sciences sociales. C'est ainsi qu'il estime que l'organisation de l'espace, objet de la géographie, se décline de manière différente selon le niveau de l'échelle géographique considéré. Il existe donc, non pas un, mais de multiples espaces, tous les systèmes spatiaux correspondant à des niveaux de systèmes sociaux. Leurs organisations résultent, d'une part, de la persistance des lieux et des discontinuités, et d'autre part, du développement des réseaux qui relient les premiers tout en restant marqués par les secondes. La mondialisation se traduit alors aussi bien par l'émergence d'un espace-monde formé d'un archipel de villes mondiales que par la recomposition des espaces de taille inférieure à celui du monde.
Les chemins explorés par Olivier Dollfus dans les domaines de la théorie, du terrain et de l'action laisseront des traces durables dans plusieurs lieux de ce monde dont il a contribué à renouveler la pensée géographique.
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Écrit par
- Régis KEERLE : maître de conférence en géographie, Université de Rennes
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