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ONDES GRAVITATIONNELLES

Détection directe d’ondes gravitationnelles

Une onde sonore modifie la pression de l’air, ce qui peut faire vibrer le tympan d’un spectateur ; une onde électromagnétique fait apparaître ou modifie le champ électromagnétique présent à un endroit, ce qui peut mettre en mouvement des charges électriques dans une antenne ; une onde gravitationnelle fait varier la métrique de l’espace-temps et donc modifie les distances. Cette onde balaie l’espace à la vitesse de la lumière, et la faiblesse de l’interaction gravitationnelle nous donne l’assurance que la variation en question sera minuscule. Concrètement, par rapport aux mesures physiques habituelles, on ne peut pas réaliser une expérience où on contrôlerait une source d’ondes avant de mesurer leur effet sur un détecteur. Comme dans le cas des rayons cosmiques qui bombardent la Terre sans que l’on comprenne toujours d’où ils viennent et comment ils ont acquis leur énergie, le physicien en quête des ondes gravitationnelles doit espérer que la nature lui fournira une source dont on comprend qu’elle sera nécessairement fugace et fort éloignée.

Des barres résonantes comme détecteurs

La détection d’ondes gravitationnelles à l’aide de barres résonantes a été proposée en janvier 1960 par le physicien américain Joseph Weber (1919-2000), de l’université du Maryland. Il argumenta que des ondes gravitationnelles pouvaient – si elles avaient une fréquence appropriée – exciter les modes de vibration d’un solide. Il fabriqua un premier détecteur fait d’un cylindre d’aluminium de 1,5 mètre de longueur et de 65 centimètres de diamètre, de fréquence fondamentale de vibration égale à 1660 hertz (Hz), couplé à des capteurs piézoélectriques grâce auxquels les vibrations de la barre étaient enregistrées. En 1969, il publie dans la revue Physical ReviewLetters un article titré « Preuve de la découverte d’un rayonnement gravitationnel », dans lequel il présente le résultat d’une recherche de coïncidence entre cinq cylindres installés dans son laboratoire et un cylindre placé 1 000 kilomètres plus loin, au Laboratoire national d’Argonne, près de Chicago. En quatre-vingt-un jours d’observation, sur la base de dix-sept signaux en coïncidence et d’une analyse statistique permettant de quantifier la probabilité de coïncidences fortuites, Weber affirme avoir détecté des ondes gravitationnelles de fréquence proche de 1 660 Hz. Fort de ce succès, sa proposition d’envoyer un détecteur sur la Lune est acceptée dans le cadre de la mission Apollo 17 en 1972. Les résultats communiqués par Joseph Weber sont cependant mis en doute par la plupart des physiciens, et des expériences plus longues et plus précises ne confirment pas ces mesures.

Les problèmes techniques liés à la méthode de Weber sont en effet nombreux. D’une part, la détection piézoélectrique nécessite un transducteur qui transforme les vibrations du cylindre en un signal électrique ; le facteur d’adaptation qui exprime le rapport de l’énergie électrique mesurable à l’énergie de vibration est de l’ordre du millionième. D’autre part, un bruit thermique non négligeable s’ajoute au bruit sismique pour faire disparaître un signal d’amplitude nécessairement fort petite.

La détection interférométrique des ondes gravitationnelles

Signal d’une onde gravitationnelle - crédits : Encyclopædia Universalis France

Signal d’une onde gravitationnelle

Le principe de la détection interférométrique des ondes gravitationnelles est de partager en deux ondes le faisceau émis par un laser puis d’analyser la recombinaison de ces deux ondes après un trajet de l’ordre de la longueur d’onde du signal recherché, soit typiquement quelques centaines de kilomètres. Si ces deux ondes lumineuses se propagent dans des directions perpendiculaires et selon des trajets de longueurs égales, on peut s’arranger pour que leur interférence soit destructive au moment de leur recombinaison. Le signal enregistré par le détecteur est[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

Classification

Médias

Implantation de l’interféromètre du projet LIGO à Livingston - crédits : LIGO

Implantation de l’interféromètre du projet LIGO à Livingston

Formation d’ondes gravitationnelles lors de la coalescence de deux trous noirs - crédits : R. Hurt/ Caltech-JPL

Formation d’ondes gravitationnelles lors de la coalescence de deux trous noirs

Fusion de trous noirs et ondes gravitationnelles - crédits : Science Photo Library/ AKG-images

Fusion de trous noirs et ondes gravitationnelles

Autres références

  • BICEP (Background Imaging of Cosmic Extragalactic Polarization)

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    • 1 média

    Le télescope B.I.C.E.P. (pour Background Imaging of CosmicExtragalacticPolarization, soit Imagerie de polarisation du fond cosmique extragalactique) est un instrument dédié à l’étude du rayonnement primordial. Il est installé sur le continent Antarctique et utilisé par des équipes de...

  • HUBBLE-LEMAÎTRE CONSTANTE DE

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    ...il est possible d’extraire une distance. Si, en outre, on parvient à voir le flash lumineux associé à l’événement qui est à l’origine de cette émission d’onde gravitationnelle, comme cela a été le cas lors de la fusion de deux étoiles à neutrons détectée le 17 août 2017 (événement appelé kilonova GW170817),...
  • LICHNEROWICZ ANDRÉ (1915-1998)

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    Mathématicien français dont les travaux portent sur la géométrie différentielle, la mécanique et la physique mathématique. Né le 21 janvier 1915 à Bourbon-L'Archambault (Allier), élève de l'École normale supérieure, André Lichnerowicz a enseigné dans les universités de Strasbourg (1941-1949),...

  • MÉDAILLE D'OR DU CNRS 2017

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    Le 27 septembre 2017, deux physiciens français, Alain Brillet et Thibault Damour, reçoivent la médaille d’or du CNRS qui récompense leurs travaux ayant joué un rôle déterminant dans la détection des ondes gravitationnelles. Ces ondes sont d’infimes déformations de l’espace-temps,...

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