ONE HEALTH (UNE SEULE SANTÉ)
Le concept One Health appliqué directement aux zoonoses
Les maladies zoonotiques représentent au moins 60 % des maladies infectieuses et pas moins des deux tiers des nouvelles maladies émergentes, ce qui souligne l’importance de leur suivi le plus précocement possible. La compréhension de la nature de la transmission des zoonoses de l’animal à l’homme est une condition fondamentale vers leur anticipation et leur contrôle efficaces. Il existe différents modes de transmission des maladies zoonotiques, ce qui rend complexe leur surveillance : transmission directe (par contact avec l’animal infecté) ; vectorielle (par un hôte intermédiaire vecteur) ; par l’environnement (eau, sol, nourriture…). La lutte efficace contre les zoonoses implique de détecter rapidement la source de la maladie et les facteurs qui contribuent à sa propagation. La combinaison de la surveillance de la santé de la faune sauvage, des animaux d’élevage et des animaux domestiques avec celle de la santé humaine peut contribuer à limiter sensiblement les risques de grandes épidémies, voire de pandémies d’origine zoonotique.
C’est dans la lutte contre les zoonoses, responsables de maladies émergentes tendant à devenir épidémiques, voire endémiques, que s’est appliqué le plus tôt et le plus efficacement le concept One Health. En effet, la prise de conscience de l’intérêt de ce concept est devenue plus prégnante lors de crises sanitaires impliquant initialement la santé animale, notamment en Afrique. C’est le cas par exemple du virus de la fièvre de la vallée du Rift (FVR). Cette maladie virale zoonotique est localisée dans certaines régions d’Afrique, dans la péninsule arabique ou encore à Mayotte et touche principalement le bétail (ovins, bovins, caprins), induisant une mortalité chez les plus jeunes animaux et un taux d’avortement importants. Les conséquences économiques sont significatives, notamment dans des régions où le commerce du bétail et de ses produits dérivés constitue la première source de revenus. À titre d’exemple, la vague d’avortements liés à l’épizootie de FVR à Mayotte en 2019 est responsable d’une chute de production du lait de 20 %. L’être humain peut également être infecté, soit par un contact direct avec les fluides biologiques des animaux infectés, notamment le sang, soit par des piqûres de moustiques infectés après piqûre du bétail. Les personnes les plus exposées sont donc celles qui sont en contact rapproché avec ces animaux d’élevage ou les personnes travaillant dans les abattoirs. La majorité des personnes exposées développent des formes légères de la maladie ou ne connaissent pas de symptômes. Néanmoins, dans certains cas, des formes graves peuvent apparaître et aboutir à des atteintes neurologiques (chez environ 1 à 3 % des patients). À Mayotte, particulièrement exposée à ce virus avec différentes épidémies ces quinze dernières années (notamment en 2018 et 2019), des dispositifs de surveillance ont été mis en place, fondés sur les approches One Health, incluant donc le suivi chez les animaux, les humains, mais aussi les vecteurs. On a ainsi pu déterminer que, contrairement à ce que les spécialistes pensaient initialement, la dynamique de la transmission de la maladie de l’animal à l’homme est principalement vectorielle (par des moustiques), plutôt que par contact direct avec l’animal infecté. Beaucoup d’autres exemples de surveillance des maladies zoonotiques selon des approches intégrées existent aujourd’hui, notamment dans des régions du monde où humains, animaux domestiques et faune sauvage vivent en contact étroit. C’est le cas par exemple pour la brucellose dans de nombreux pays, dont ceux du Moyen-Orient, pour la tuberculose bovine en Afrique subsaharienne, la leptospirose aux Fidji, ou encore Ebola et la grippe aviaire en Afrique de l’Ouest. La nécessité d’adopter[...]
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Écrit par
- Yannick SIMONIN : virologiste, maître de conférences, université de Montpellier
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Média
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